ProgrammeTV > Théùtre > C'Ă©tait quand la derniĂšre fois ? Théùtre C'Ă©tait quand la derniĂšre fois ? Genre : Théùtre DurĂ©e : 95 minutes Avec Zinedine Soualem, Virginie Hocq PrĂ©sentĂ© par : Corinne Tong ChaĂŻ. RĂ©sumĂ©. Lors d'un dĂźner qui promettait d'ĂȘtre aussi morne que les autres, une femme annonce en souriant Ă son mari qu'elle vient de l'empoisonner. Durant le laps de temps
NOTE DâINTENTION Câest eÌtrange de se sentir aÌ la fois fort et au bord du gouffre. Câest ce que jâeÌprouve, et jâignore laquelle de ces deux impressions est fausse ni lâune ni lâautre probablement. » Samuel Beckett, lettre aÌ Pamela Mitchell Encore Beckett. Tant quâil reste en lui des choses que je ne comprends pas, qui me sont obscures, eÌtrangeÌres, je crois que je peux le mettre en sceÌne. ApreÌs Cap au pire. ApreÌs la dernieÌre bande. ApreÌs Lâimage et Words and Music, Fin de partie donc la grande pieÌce de Beckett, sa preÌfeÌreÌe, celle quâon nâose pas aborder sans un certain bagage. Plus aboutie que Godot, moins rabaÌcheÌe aussi peut- eÌtre. Se dire je vais monter Fin de partie, câest un peu comme se dire je vais monter Hamlet Excitant et effrayant. Les meÌtaphores maritimes abondent chez Beckett, lâIrlandais. Et jâai en abordant Fin de partie, le sentiment dâaccoster sur une iÌle apreÌs avoir longtemps voyageÌ, avec mes preÌceÌdentes mises en sceÌne, sur une mer deÌconcertante, tantoÌt calme tantoÌt en furie. Jâai fait le voyage aÌ lâenvers commençant par lâun des derniers textes Cap au pire pour arriver aÌ Fin de partie, que Beckett eÌcrivit juste avant la DernieÌre bande. ApreÌs des anneÌes dâerrance, Beckett est devenu un eÌcrivain reconnu. Molloy a eÌteÌ publieÌ. En attendant Godot a connu un succeÌs international. Aborder Fin de partie, câest me poser la question du theÌaÌtre, retrouver le theÌaÌtre, apreÌs mâeÌtre centreÌ sur les mots et la musicaliteÌ Tout aÌ coup, il faut voir les choses en grand. Quatre comeÌdiens sur sceÌne et un deÌcor. Je retrouve lâexcitation dâune premieÌre fois, la magie enfantine des trois coups et du theÌaÌtre de Guignol. Il y a de cela dans le deÌbut de Fin de partie Clov tirant les rideaux et soulevant les draps qui recouvrent Hamm et les poubelles de Nell et Nagg. Câest comme un petit theÌaÌtre, une sceÌne qui tous les soirs commence et tous les soirs se termine, indeÌfiniment. Je nâai pas envie dâexeÌgeÌse et dâinterpreÌtations. Juste le plaisir des gestes et des mots. Regarder Denis Lavant et FreÌdeÌric Leidgens il faut de grands acteurs pour jouer Beckett, Clov et Hamm, le fils adoptif et le peÌre ou le maiÌtre et le domestique On a pu dire que lâun incarnait le corps quand lâautre eÌtait lâaÌme, que lâun eÌtait James Joyce quand lâautre eÌtait Beckett, mais cela importe-t- il ?. Clov, bouge tout le temps et parle peu. Hamm est immobile et volubile. Lâun est aveugle et paralytique, lâautre boiteux. Clov prend soin de Hamm. Hamm a autrefois pris soin de Clov. Ă moins que ce ne soit lâinverse. Ils passent leur temps aÌ se chercher sans se trouver. Ils ne peuvent se deÌtacher lâun de lâautre. La plus grande peur du tyrannique Hamm est que Clov le quitte. Clov exeÌcute les ordres, parle de partir sans quâon sache sâil passera aÌ lâacte. On ne sait pas ce que pense Clov. Clov est une tombe. Avec eux, vivent, chacun dans une poubelle, Nagg et Nell, les parents de Hamm. Ils sont aÌ la fin de leur vie mais pas encore morts. Parfois ils parlent et ce quâils ont aÌ dire est beau et dâune tristesse infinie Qui appelais-tu, quand tu eÌtais tout petit et avais peur, dans la nuit ? Ta meÌre? Non. Moi. On te laissait crier. Puis on tâeÌloigna, pour pouvoir dormir. Un temps. Je dormais, jâeÌtais comme un roi, et tu mâas fait reÌveiller pour que je tâeÌcoute. Ce nâeÌtait pas indispensable, tu nâavais pas vraiment besoin que je tâeÌcoute. Dâailleurs je ne tâai pas eÌcouteÌ. Un temps. JâespeÌre que le jour viendra ouÌ tu auras vraiment besoin que je tâeÌcoute, et besoin dâentendre ma voix, une voix. Un temps. Oui, jâespeÌre que je vivrai jusque-laÌ, pour tâentendre mâappeler comme lorsque tu eÌtais tout petit, et avais peur, dans la nuit, et que jâeÌtais ton seul espoir. » dit Nagg, autrefois patriarche, deÌsormais reÌduit aÌ vivre dans une poubelle dont il sort la teÌte uniquement suivant le bon-vouloir de son fils. Rarement, je crois, une pieÌce de theÌaÌtre nâa aussi lucidement et sobrement exposeÌ les liens dâamour-haine qui lient les membres dâune famille. Strindberg et Ibsen sont deÌpasseÌs haut-la-main. Clov, Hamm, Nell et Nagg vivent dans un espace indeÌfini. Un inteÌrieur » dit Beckett dans sa didascalie, un inteÌrieur doteÌ de deux feneÌtres donnant sur lâexteÌrieur. Et câest sans doute laÌ pour moi, la gageure de ce spectacle repreÌsenter cet espace gris et immateÌriel et pourtant vivant, bruissant des bruits de la mer quâon aperçoit par lâune des feneÌtres, alors que lâautre donne sur la terre. Dans cet espace, gris noir clair » dit Clov !, la grande crainte des personnages est que la lumieÌre les quitte deÌfinitivement. Sommes-nous sur Terre? Pas si suÌr. Peut-eÌtre est-ce deÌjaÌ le purgatoire, peut-eÌtre la maison est-elle sur un iÌlot, seul endroit encore peupleÌ apreÌs la fin du monde Beckett est le seul eÌcrivain de ma connaissance qui sache faire de la science-fiction au theÌaÌtre. Ă la lumieÌre dâaujourdâhui, le texte prend une eÌtrange rĂ©sonance eÌcologique. Hamm. â La nature nous a oublieÌs. Clov. â Il nây a plus de â Plus de nature ! Tu vas fort. Clov. â Dans les Mais nous respirons, nousNous perdons nos cheveux, nos dents! Notre fraiÌcheur ! Nos ideÌaux !Clov. â Alors elle ne nous a pas oublieÌs. Peut-eÌtre aussi sommes-nous sur un bateau, Clov se sert dâune lunette » pour regarder au loin, Hamm reÌclame sa gaffe », accessoire indispensable aÌ tout marin qui se respecte. Peut- eÌtre sommes-nous sur lâArche de NoeÌ, comme lâeÌvoque James Knowlson, le grand biographe de Beckett Sur la terre aÌ moitieÌ engloutie par les eaux, la maison de Hamm est, comme lâArche, un refuge contre la calamiteÌ du dehors ; au lieu de se deÌcouvrir bonnes dans les yeux de Dieu, les creÌatures de ce monde sâaperçoivent que la lumieÌre meurt ; sur cette terre lâherbe ne pousse pas et les graines quâa semeÌes Clov ne germeront jamais » ». LâatmospheÌre fait aussi songer aÌ celle du ceÌleÌbre poeÌme de Baudelaire Recueillement, maladroi- tement citeÌ par Hamm aÌ la fin de la pieÌce. Et, comme un long linceul traiÌnant aÌ lâOrient, / Entends, ma cheÌre, entends la douce Nuit qui marche. ». Jâaimerais avec les acteurs trouver cette aÌpre douceur et une luciditeÌ sans amertume. Câest eÌtrange de se sentir aÌ la fois fort et au bord du gouffre » dit Beckett dans une lettre aÌ la femme quâil aime au moment ouÌ il eÌcrit Fin de partie. Câest cet eÌquilibre entre le gouffre et la force, le sol qui se deÌrobe et ce qui fait quâon tient debout quâil sâagira de trouver. RythmeÌe par le temps de chaque chose le temps de se lever, de manger, de prendre son calmant, de raconter une histoire et le reÌveil auquel Clov se raccroche comme si câeÌtait la seule chose encore tangible, Fin de partie dit la longue marche du temps. Sa fin et son eÌternel recommencement. Le texte dit aussi peut-eÌtre encore, ce quâil ne dira plus dans Cap au pire le plaisir de raconter une histoire et de dire des mots dans un theÌaÌtre Le souffle quâon retient et puis⊠il expire. Puis parler, vite, des mots, comme lâenfant solitaire qui se met en plusieurs, deux, trois, pour eÌtre ensemble, et parler ensemble, dans la nuit. » Jacques Osinski
BrunoGaccio, Ă l'affiche de la piĂšce « Les pĂątes Ă l'ail », dont il est l'auteur, au théùtre de la ScĂšne Parisienne, Ă©tait lâinvitĂ© de ValĂ©rie Expert et Gilles Ganzmann sur Sud
Une piĂšce pas comme les autres Ce dĂ©but dâannĂ©e a Ă©tĂ© chargĂ© pour les animateurs de la piĂšce. Les rĂ©pĂ©titions se sont multipliĂ©es, jusquâĂ la derniĂšre semaine oĂč elles avaient lieu tous les aprĂšs-midis. Câest vraiment durant cette derniĂšre semaine que jâai rĂ©ussi Ă me familiariser avec mon personnage. Avant pour moi, câĂ©tait abstrait. Une fois dans le dĂ©cor et avec les costumes, ça devient rĂ©el » explique Michael Miraglia qui intĂšgre pour la premiĂšre fois la troupe du TĂ©lĂ©vie. 13 janvier, rĂ©pĂ©titions gĂ©nĂ©rales Ă Nivelles Les animateurs ont rĂ©pĂ©tĂ© plusieurs fois leurs textes sous les conseils toujours avisĂ©s du metteur en scĂšne Jean-Paul Andret. Le stress monte pour Thomas Van Hamme. Câest la premiĂšre fois quâil jouait la piĂšce en conditions rĂ©elles Câest dingue, on est tellement Ă fond quâon ne voit pas le temps passer. Quand ça se termine, on est crevĂ©. Mais câest une bonne fatigue, câest exaltant ». Jour J AprĂšs une bonne nuit de sommeil, le rendez-vous est fixĂ© Ă 18h pour une derniĂšre italienne Au théùtre, une italienne câest une rĂ©pĂ©tition sans mettre le ton, avec une voix neutre qui permet aux acteurs de mĂ©moriser leurs textes sans se fatiguer » explique Jean-Paul Andret. AprĂšs une derniĂšre mise au point, les comĂ©diens se retrouvent dans les loges. Il y rĂšgne une vĂ©ritable effervescence. Plusieurs personnalitĂ©s de la chaĂźne viennent encourager leurs petits camarades. Derniers ajustements de costumes, vĂ©rification de chaque accessoire. Tout le monde y va de son commentaire amusant pour dĂ©tendre lâatmosphĂšre bouillonnante. On charrie Michael sur son costume gris qui colle parfaitement Ă son personnage de jeune avocat dragueur. DerniĂšre interview avec la presse pour Jacques Van de Biggelaar. Il est presque 20h00. LevĂ©e de rideau dans 5 minutes ! Les comĂ©diens se rassemblent et poussent un cri de guerre pour sâencourager Câest un rituel trĂšs courant au théùtre et ça fait du bien, on est soudĂ© » dit Fanny Jandrain. Câest parti ! Michael Miraglia entre en scĂšne dans le rĂŽle de FrĂ©dĂ©ric sous les applaudissements du public trĂšs heureux de le dĂ©couvrir. Dans les coulisses, on guette les rires et les applaudissements des spectateurs. Ils ont tous le trac mais ils ont surtout hĂąte de monter sur scĂšne pour la premiĂšre fois. Michael, surexcitĂ©, raconte Ă Fanny Jandrain Câest dingue ce qui mâarrive, si on mâavait dit que je ferais ça il y a un an, je ne lâaurais jamais cru, et en plus jâadore ça. Tu avais raison, câest gĂ©nial comme sensation ». Enthousiaste, Fanny revient dans les coulisses aprĂšs son premier passage Câest fait les gars, on y est. Je suis trop contente » Pendant lâentracte, Jean Paul Andret revient en loge En un mot les amis, câest tout simplement, GENIAL » Il fĂ©licite les acteurs et leur explique quâils ont trouvĂ© le bon rythme Continuez comme ça ! ». Thomas Van Hamme est impressionnĂ© par la performance de Luc Gilson Tu es Ă fond dans ton rĂŽle, du coup câest encore plus facile pour moi de jouer, je me laisse emporter ». Il faut dire que le rĂŽle interprĂ©tĂ© par Luc Gilson est extrĂȘmement physique, le rĂŽle principal de la piĂšce dans lequel il excelle particuliĂšrement. Au final, le public ravi a rĂ©compensĂ© les acteurs dâun tonnerre dâapplaudissements⊠de quoi commencer cette tournĂ©e sur une note positive !
CĂ©tait quand la derniĂšre fois ? - Théùtre Tristan Bernard Europe France Ăle-de-France Paris Paris - ActivitĂ©s Théùtre Tristan Bernard Théùtre Tristan Bernard Est-ce votre Ă©tablissement? 37 avis NÂș 581 sur 3 386 choses Ă voir/Ă faire Ă Paris Concerts et spectacles, Théùtres 64 rue du Rocher, 75008 Paris, France Enregistrer Points forts des avis
De bon matin, comme chaque matin, j'ai pris mon cartable pour partir Ă l'Ă©cole. C'Ă©tait un beau matin de printemps. En chemin, lalalalĂšre, j'ai aidĂ© une trĂšs vieille dame Ă lunettes Ă traverser la rue. La boulangerie-tapisserie dĂ©roulait des kilomĂštre de gĂąteaux, d'Ă©clairs au chocolat, chaussons au pomme et pains au raisin. C'est alors que je l'ai aperçu, mon petit moineau, couchĂ© sur le cotĂ©, sans doute victime d'un accident de toiture, d'un rat de gouttiĂšre ou d'un mauvais coup de fusil...Les voix de trois garçon en coulisses. Julie Jim, Jules, JĂ©rĂ©mie, revenez ! J'ai trouvĂ© un petit moineau garçons apparaissent, traĂźnant des pieds. Ils se penchent vers les mains de Julie. Jules impassible Bah ! Nous les enfants, on a toujours des histoires d'oiseaux. Ăcoutez mes anges ! Un jour j'ai ramassĂ© un petit rouge- gorge mort. Je l'ai glissĂ© entre deux feuilles de peuplier, attachĂ©es avec un petit bout de ficelle et je l'ai enterrĂ© dans ce joli cercueil. Jim Moi un jour, j'ai entendu "poum" sur ma porte-fenĂȘtre. "Quel Ă©tourdi, cet Ă©tourneau", ai-je criĂ©! Il a failli casser ma vitre. DrĂŽle de façon de sonner Ă la porte ! Jim Je lui ai mis un peu de glace sur le tĂȘte. Jules et JĂ©rĂ©mie Ben, la glace ... La vitre ... Jim s'Ă©cartant en marmonnant La glace, la vitre... La vitre, la glace ... Je ne vois pas. JĂ©rĂ©mie Et moi, un jour, en montagne, j'ai vu un aigle royal sur la neige. Il avait l'air d'un petit garçon perdu. Jim Oui... En autobus ! Les trois garçons s'esclaffent Julie ArrĂȘtez ! Vos bavardages tordus ne sont d'aucune utilitĂ©. Vous feriez mieux d'examiner mon moineau. L'oiseau inanimĂ© passe d'abord dans les mains de Jim. Jim d'un ton trĂšs professoral Voyons, voyons. Euh... A mon avis, tout vient des plumes. En effet, si cette particularitĂ© est douce au toucher... Large geste de caresse des plumes. ...elle fragilise l'individu. Jules J'ajouterais les pĂątes aussi. Regardez, fines comme des spaghettis. Les pauvres, elles m'ont tout l'air d'ĂȘtre cuites. JĂ©rĂ©mie Dommage. Pourtant, quel joli petit mec ! Ce doit ĂȘtre un jeune mĂąle. Julie ArrĂȘtez, on se croirait Ă l'hĂŽpital. Nous n'avançons pas parce que nous ne parlons pas la langue des oiseaux. J'ai une idĂ©e. Si nous les imitons. Peut-ĂȘtre mon moineau nous comprendrait-il ! Jim Bonne idĂ©e. Je me jette Ă l'eau. Il mime la dĂ©marche d'un hĂ©ron. Je suis un hĂ©ron. Pas mal, non ? Jules Et moi, mimant une chouette, je suis une ... une chouette. JĂ©rĂ©mie Et moi, mimant un coucou, un coucou ! Julie On t'Ă©coute, Jim ! Jim Un HĂ©ron au long bec emmanchĂ© d'un long cou Ă©tait Ă l'affut de grosses nouilles. Ăa va bouillir, ça va bouillir, se rĂ©jouissait dĂ©jĂ l'Ă©chassier qui les chassa mais les rata, quittant la mare sans se marraient petit mot de Louise mĂȘme moi je n'ai rien compris Ă cet espĂšce de poĂšme. Julie Mon moineau non plus. Essayons un autre oiseau. A toi, Jules ! Jules Bonjour je suis la chouette. Cherchez sous mes couvertures, vous ne me trouverez pas. Car sous les feuilles mon y est ! Vous, les souris, cessez de sourire ! Vers, ne jouez pas les poĂštes ! Et vous, les fourmis rouges, serrez les dents, serrez les rangs ! Alors ?? Julie Toujours rien. Un dernier essai ! Au tour de JĂ©rĂ©mie ! JĂ©rĂ©mie Voici Madame Ou-Ou ! Les autres Coucou ! Coucou ! JĂ©rĂ©mie Qui dĂ©pose son Ćuf dans le nid de son choix SitĂŽt nĂ©, son poussin ... Les autres Coucou... Coucou ! JĂ©rĂ©mie ... Bouscule ses frĂ©rots Ă l'aide de son dos. Ainsi les petits choient ... Les autres Hou... Hou ! JĂ©rĂ©mie ... de haut en bas, passant de vie Ă trĂ©pas ! Les autres OulĂ , oulĂ , aĂŻe ! Julie Oh, bravo, JĂ©rĂ©mie ! Cette affreuse histoire de coucou a ranimĂ© mon moineau. Il veut fuir ce cauchemar. Regardez, il se rĂ©veille, il bat des ailes, il s'Ă©tire ! Les trois garçons Il va se tirer ! Julie Tant mieux ! Ăa y est, il s'envole. Suivons-le ! Les quatre enfants battent des bras en piaillant, mais sans succĂšs. Julie On n'y arrivera jamais ! Jim Nous n'avons pas de plumes ! Jules Que des stylos ! Julie Dommage ! Quel beau voyage nous aurions pu faire, lĂ -haut, au-delĂ des nuages ! Jim Jusqu'Ă la lune ! JĂ©rĂ©mie Nous aurions traversĂ© fleuves et riviĂšre sans nous mouiller les chaussures. Jules Tout en dĂ©vorant des mouches et des moustiques. Jules Et nous aurions accompagnĂ© les cigognes jusqu'au dĂ©sert africain. Une cloche ou une sonnerie d'Ă©cole se fait entendre. Les enfants s'immobilisent et reprennent leurs cartables qu'ils installent avec peine sur leurs Ă©paules. Jim Fini de rĂȘver. l'Ă©cole a prĂ©vu de nos coller des cartables si lourds que nous ne pourrons jamais nos envoler. JĂ©rĂ©mie Dis donc, Jim, as-tu demandĂ© Ă un moineau combien faisaient deux fois deux ? Jim Pas la peine, deux fois deux, ça fait quatre Ćufs ! JĂ©rĂ©mie TrĂšs drĂŽles. Rassure-toi, si l'Ă©cole nous oblige Ă garder les pieds sur terre, elle nous apprends aussi Ă ĂȘtre des aigles en calcul, de chouettes en dessinateurs, des rossignol en poĂ©sie, des oiseaux migrateurs incollables en gĂ©ographie... Jules Mais aussi des martinets sans peur du martinet. Julie Des piafs au corps beau ! Jim Et des cygnes d'intelligence quand nous n'aurons plus besoin de compter sur nos doigts ! Tous Vite, on ne veut pas rater ça ! Ils disparaissent. Seule Julie reste en ScĂšne. Pour ĂȘtre un peu plus haute, elle monte sur son cartable, le visage tournĂ© vers le ciel. Julie OĂč est-il, maintenant, mon petit moineau ? Immobile comme une statue au sommet d'un arbre ? CachĂ© dans les fleurs des champs ? Ou alors mort de rire sous les chatouilles de la brise ? Vis ta vie d'oiseau. Je vivrai la mienne, sans elle, celle que tu passes lĂ -haut entre le ciel bleu et la planĂšte de notre Terre oĂč tu viens picorer tant de petites graines. Ton vol ne vole que dans nos rĂȘves et c'est bien ainsi. Merci ! FIN Dans le prochain article une seconde PiĂšce de théùtre toujours en provenance de ce livre.
La9 Ăšme Ă©dition des Théùtrales de Casablanca entame la saison du printemps avec une nouvelle piĂšce alliant grands talents du théùtre et de la comĂ©die : « CâĂ©tait quand la derniĂšre fois ? » sera sur les planches du Megarama Casablanca le jeudi 18 avril. SignĂ©e Emmanuel Robert-Espalieu et mise en scĂšne par la surdouĂ©e Johanna BoyĂ©, «CâĂ©tait quand la derniĂšre
Disparitions Le directeur de lâOdĂ©on-Théùtre de lâEurope a succombĂ© Ă une pneumonie, samedi 28 novembre, Ă lâĂąge de 67 ans. La nouvelle est tombĂ©e samedi 28 novembre, et un voile de tristesse sâest abattu sur le théùtre le metteur en scĂšne Luc Bondy, directeur de lâOdĂ©on-Théùtre de lâEurope, est mort dâune pneumonie, au matin de ce samedi, Ă Zurich, Ă 67 ans. On le savait malade, mais la maladie faisait partie de sa vie, elle lâaccompagnait depuis tant dâannĂ©es, et il la surmontait si bien quâil apparaissait comme un phĂ©nix, toujours renaissant. En juillet, il Ă©tait parti pour la Suisse, pour se soigner. Il devait mettre en scĂšne Othello, de Shakespeare, Ă partir de fin janvier 2016. Il avait repoussĂ© Ă la saison prochaine ce spectacle dont il parlait magnifiquement, comme toujours quand il prĂ©parait une crĂ©ation. CâĂ©tait un oiseau aux couleurs de paradis, pour reprendre lâexpression de son ami Peter Stein, avec qui il a travaillĂ© Ă la SchaubĂŒhne de Berlin, dans les annĂ©es 1980 un homme multiple, changeant, brillant, limpide et insaisissable. Son théùtre lui ressemblait virevoltant de vie, pressĂ© de dĂ©sirs, teintĂ© dâombres fugitives, dont lâune Ă©tait celle de lâHistoire. Luc Bondy appartenait Ă une famille juive issue de la Mitteleuropa. Son grand-pĂšre, Fritz Bondy, avait dirigĂ© le Théùtre de Prague, et connu Kafka. Son pĂšre, François Bondy, journaliste et intellectuel, sâĂ©tait rĂ©fugiĂ© Ă Zurich pour fuir le nazisme. Câest lĂ que Luc Bondy naĂźt, le 17 juillet 1948. Mais câest en France quâil passe la plus grande partie de son enfance et de son adolescence. Dans lâappartement familial, il croise les amis de son pĂšre, EugĂšne Ionesco, Witold Gombrowicz, Marguerite Duras, Cioran, parmi beaucoup dâautres. Il les Ă©coute, se nourrit de leurs histoires, nâose pas parler. Mais il retient tout, les voix, les gestes, les anecdotes. Sans le savoir, il se nourrit de ce théùtre de la vie quâil nâa jamais cessĂ© dâaimer par la suite. Puis viennent les annĂ©es loin de Paris, dans un pensionnat des PyrĂ©nĂ©es oĂč Luc Bondy attend que le temps passe. Il ne tient pas en place en cours, il est mauvais Ă©lĂšve, et il se demande ce quâil va faire, quand il arrĂȘte son cursus, sans avoir eu le bac. De retour Ă Paris, il entend parler de lâĂ©cole Jacques Lecoq, une fameuse pĂ©piniĂšre, oĂč lâon ne compte pas ceux qui y sont passĂ©s, dâAriane Mnouchkine Ă Christoph Marthaler. Cette Ă©cole lui apprend quâil doit voler de ses propres ailes. Il sâen va, part pour lâAllemagne, en 1969. Luc Bondy a 21 ans. Câest le grand saut. Il dĂ©couvre un pays oĂč les ruines de la seconde guerre mondiale sont encore prĂ©sentes. Et il commence Ă travailler dans le théùtre. DĂ©jĂ , il se dĂ©marque. Il saute les Ă©tapes, qui imposent dâordinaire une longue formation Ă la mise en scĂšne en tant quâassistant. DĂšs 1971, il signe ses premiers spectacles, Le Fou et la nonne, de Witkiewicz, Ă Göttingen, et Les Bonnes, de Genet, Ă Hambourg. Rainer Werner Fassbinder vient les voir. SĂ©duit, il confie Ă Luc Bondy sa piĂšce LibertĂ© Ă BrĂȘme. A 26 ans, Fassbinder est dĂ©jĂ connu. Les critiques des grands journaux allemands se dĂ©placent pour assister Ă la crĂ©ation de LibertĂ© Ă BrĂȘme, qui a lieu en 1972 Ă Nuremberg. Ils dĂ©couvrent un metteur en scĂšne. La carriĂšre de Luc Bondy est lancĂ©e. Dans les annĂ©es suivantes, il met en scĂšne BĂŒchner, Ionesco, Goethe ou Edward Bond. Son style le dĂ©marque, sa renommĂ©e grandit vite. Elle le mĂšne au dĂ©but des annĂ©es 1980 Ă la SchaubĂŒhne de Berlin. Câest la gloire. CrĂ©er comme si câĂ©tait la derniĂšre fois La SchaubĂŒne est la scĂšne la plus importante dâEurope. Si elle est organisĂ©e comme un collectif, elle est en fait dirigĂ©e par Peter Stein, qui a repĂ©rĂ© Luc Bondy. La rejoindre, câest travailler avec les plus grands comĂ©diens, Jutta Lampe, Edith Clever, Angela Winkler, Otto Sander et Bruno Ganz, les deux anges des Ailes du dĂ©sir, le film de Wim Wenders. Câest aussi se confronter Ă des metteurs en scĂšne dâexception, aux styles radicalement diffĂ©rents, Peter Stein et Klaus MichaĂ«l GrĂŒber. Câest enfin rejoindre Berlin, la ville dĂ©chirĂ©e par le Mur, oĂč lâon vit avec une intensitĂ© unique en Allemagne. Luc Bondy sây sent chez lui. A la SchaubĂŒhne, il rencontre Botho Strauss, le dramaturge de la troupe, qui devient un compagnon de route de son théùtre, et un ami. Il crĂ©e plusieurs de ses piĂšces Kalldewey, La Guide, Le Temps et la chambre⊠et continuera par la suite. Ce temps est aussi celui oĂč Luc Bondy apprend la maladie. Il est atteint dâun cancer. Peter Stein lui dit Surtout, tu travailles, tu continues, on tâaidera. » Luc Bondy surmonte lâĂ©preuve. La connaĂźtre aussi jeune donne un autre ton Ă la vie. Cette nĂ©cessitĂ© dâĂȘtre dans lâinstant, et de crĂ©er comme si câĂ©tait la derniĂšre fois, marque toute la trajectoire, et les mises en scĂšne de Luc Bondy, qui aura un autre cancer, et bien dâautres attaques⊠La maladie nâĂ©tait pas un tabou chez lui. Il en parlait, la combattait avec un Ă©tat dâesprit exceptionnel. Il la mettait dans la vie, dont il jouissait, et qui lui a donnĂ© deux enfants, les jumeaux EloĂŻse et Emmanuel, de son mariage avec la metteuse en scĂšne Marie-Louise Bischofberger. Mais revenons Ă la SchaubĂŒhne. Câest dans ces annĂ©es-lĂ que Luc Bondy fait ses dĂ©buts en France, oĂč lâinvite Patrice ChĂ©reau, qui dirige le Théùtre de Nanterre-Amandiers. Sa premiĂšre crĂ©ation, Terre Ă©trangĂšre, dâArthur Schnitzler, en 1984, est un Ă©vĂ©nement qui marque la dĂ©cennie redĂ©couverte dâun auteur, dĂ©couverte dâun metteur en scĂšne. A partir de ce moment-lĂ , Luc Bondy se partage entre Paris et Berlin. Toujours entre deux avions, deux projets, plusieurs vies. Un appĂ©tit de lecture inextinguible Ses amitiĂ©s sont nombreuses, sa soif de rencontres ne tarit jamais, son appĂ©tit de lecture, attisĂ© par lâinsomnie, est inextinguible oĂč quâil aille, il a un livre Ă la main, que souvent il donne, quand il lâa lu. Il Ă©crit, aussi, de beaux livres A ma fenĂȘtre, chez Bourgois, en 2009 ; Dites-moi qui je suis, chez Grasset, en 1999âŠ. Comme il lâa toujours fait, il continue, agrandit son cercle de mises en scĂšne, de villes, de fonctions. De 1985 Ă 1987, il succĂšde Ă Peter Stein Ă la direction de la SchaubĂŒhne de Berlin. De 2003 Ă 2013, il dirige les Wiener Festwochen, le prestigieux festival de Vienne. En mars 2012, lâannonce de sa nomination Ă lâOdĂ©on-Théùtre de lâEurope, Ă Paris, en remplacement dâOlivier Py, suscite une polĂ©mique. Luc Bondy fait front. Il fait toujours front, Ă sa maniĂšre. Soit par lâattaque, soit par lâesquive. Il a lâintelligence vive, et il sait la force de son art qui en fait un des premiers metteurs en scĂšne en Europe, au théùtre et Ă lâopĂ©ra, oĂč il a signĂ© de belles productions, en particulier Hercules musique de Haendel, Le Tour dâĂ©crou musique de Benjamin Britten ou Julie musique de Philippe Boesmans. Sur sa route, dans les annĂ©es 1990 et 2000, il y a son ami Peter Handke, Ibsen, Guitry, Racine, Beckett, Yasmina Reza, Martin Crimp, Ionesco, Marivaux, MoliĂšre⊠Luc Bondy aimait varier les genres et aurait aimĂ© redorer le blason du théùtre dit de boulevard. On pourrait sâarrĂȘter sur nombre de ses mises en scĂšne. Il en a signĂ© une soixantaine. Lire aussi La carriĂšre inĂ©gale de Luc Bondy Ă lâopĂ©ra Laissons venir quelques souvenirs le bruit des balles sur le terrain de tennis qui servait de dĂ©cor Ă Terre Ă©trangĂšre ; le son des pas de John Gabriel Borkman, reclus dans son grenier, dans la piĂšce dâIbsen du mĂȘme nom ; la vibration fĂ©brile de lâair, dans La Mouette, quand Arkadina comprend quâelle est trompĂ©e par son amant Trigorine. Laissons entrer les acteurs, Bulle Ogier, Michel Piccoli, Jutta Lampe, Micha Lescot, Gert Voss, Bruno Ganz, Isabelle Huppert⊠Chaque crĂ©ation de Luc Bondy avait une couleur. Toutes reposaient avant tout sur les distributions, que le metteur en scĂšne choisissaient avec un soin extrĂȘme. Il disait dâailleurs que quand le choix des acteurs Ă©tait fait, 80 % du travail lâĂ©tait. CâĂ©tait Ă©videmment Ă la fois vrai et faux, comme tout ce quâil dĂ©clarait la valeur de ses propos tenait Ă lâinstant oĂč il les exprimait. Ils Ă©taient Ă©phĂ©mĂšres, Ă lâimage du théùtre, que Luc Bondy ne cherchait pas Ă rĂ©volutionner. Il lâhabitait, Ă la façon dâune maison oĂč tout vibre, tout bruit, crie ou chuchote, pleure ou aime. Câest cela qui Ă©tait beau, dans ses mises en scĂšne. Entendre et sentir tous les palpitements de la vie. Brigitte Salino Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil Ă la fois Ce message sâaffichera sur lâautre appareil. DĂ©couvrir les offres multicomptes Parce quâune autre personne ou vous est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil. Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil Ă la fois ordinateur, tĂ©lĂ©phone ou tablette. Comment ne plus voir ce message ? En cliquant sur » et en vous assurant que vous ĂȘtes la seule personne Ă consulter Le Monde avec ce compte. Que se passera-t-il si vous continuez Ă lire ici ? Ce message sâaffichera sur lâautre appareil. Ce dernier restera connectĂ© avec ce compte. Y a-t-il dâautres limites ? Non. 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AprÚs3 festivals à guichet fermé au Théùtre des Béliers, plus de 1000 représentations à Paris et un triomphe à Lyon la saison derniÚre, la comédie de Fabienne Galula, mise en scÚne par Jean-Philippe Azéma (Entrez sans frapper) est de retour au théùtre avec sa distribution 100% lyonnaise.Bienvenue au paradis des gommettes, des doudous et des anti-dépresseurs !
Notre ancienne GAEL Guest repart en tournĂ©e pour vous faire rire aux Ă©clats avec son nouveau spectacle âCâĂ©tait quand la derniĂšre fois?â.Cet automne, Virginie Hocq fera une tournĂ©e des théùtres belges avec Zinedine Soualem. Les deux humoristes partagent lâaffiche de âCâĂ©tait quand la derniĂšre foisâ, une piĂšce signĂ©e Emmanuel pitch Quoi de plus efficace pour rĂ©gler un problĂšme que de sâen dĂ©barrasser de maniĂšre dĂ©finitive » ? Un soir, comme tous les soirs de sa petite vie bien ordonnĂ©e, une femme va commettre le pire lâindicible et inavouable acte, dâempoisonner, de mettre Ă mort son mari. Une comĂ©die dĂ©lirante et bien sĂ»r pleine de le contenu insĂ©rĂ© d'un rĂ©seau de mĂ©dias sociaux qui souhaite Ă©crire ou lire des cookies. Vous n'avez pas donnĂ© la permission pour ici pour autoriser cela de toute façonLes dates Le 11/10 Centre culturel de Nivelles Le 12/10 Théùtre Royal de Mons Le 13/10 Théùtre Saint-Michel, Bruxelles Le 19/10 Salle Baudouin IV, Braine-le-Comte Le 20/10 le Forum de LiĂšge Le 21/10 Théùtre Royal de Namur Le 24/11 Palais des Beaux Arts Le 29/03 Le Central, La LouviĂšre Le 30/03 Centre culturel de Huy RĂ©servez vos tickets iciPLUS DE CULTURE Lâamie prodigieuse » les premiĂšres images de la version tĂ©lĂ© sont lĂ Marc Lavoine Aimer quelquâun, câest lui apprendre aÌ marcher seul » CinĂ©ma 5 sorties Ă ne pas rater en septembre Ce quâon a pensĂ© de la derniĂšre saison dâOrange is the New Black Rencontre Claire Chazal se prĂȘte au jeu du tac-au-tac
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Wajdi Mouawad est un personnage important dans le monde du théùtre quĂ©bĂ©cois contemporain. Traitant, entre autres, de la question des origines, du cycle de la haine et de la violence inhĂ©rente Ă la guerre ainsi que du pouvoir de la connaissance, la piĂšce Incendies, sortie en 2003, deuxiĂšme volet de la tĂ©tralogie Le Sang des promesses, a connu un succĂšs international. Incendies est donc une piĂšce importante dans le paysage du théùtre de lâextrĂȘme contemporain. Câest pourquoi nous avons dĂ©cidĂ© de nous intĂ©resser de plus prĂšs Ă cette piĂšce. Wadji Mouawad Wajdi Mouawad est dramaturge et metteur en scĂšne quĂ©bĂ©cois[1]. NĂ© au Liban le 16 octobre 1968 Coissard, p. 11, il devient enfant-soldat trĂšs jeune Coissard, p. 12. Il reste Ă la solde des miliciens jusquâĂ ses huit ans, moment oĂč ses parents dĂ©cident de quitter le pays. Ils sâĂ©tablissent alors en France. En 1983, lorsque Mouawad a 15 ans, la famille quitte la France pour le QuĂ©bec. Au QuĂ©bec, Mouawad obtient son diplĂŽme de lâĂcole Nationale de Théùtre du Canada en 1991. AprĂšs sa sortie de lâĂ©cole, il cofonde le Théùtre Ă Parleur avec Isabelle Leblanc et dĂ©bute immĂ©diatement sa carriĂšre de metteur en scĂšne avec deux piĂšces Ă©crites par son frĂšre, soit Al Malja en 1991 et LâExil en 1992 Coissard, p. 12-13. De cette Ă©poque Ă aujourdâhui, Mouawad monte une foule de piĂšces de genres variĂ©s, dont des piĂšces quâil a Ă©crites lui-mĂȘme Coissard, p. 14. DĂšs 1991, il met en scĂšne un texte Ă lui, soit Partie de cache-cache entre deux TchĂ©coslovaques au dĂ©but du siĂšcle Coissard, p. 14-15. MOUAWAD, Wajdi, Incendies Le sang des promesses, 2, MontrĂ©al, LemĂ©ac/Actes Sud, coll. Babel », 2011. Cependant, Mouawad est principalement connu pour sa tĂ©tralogie théùtrale Le Sang des promesses. Ainsi, câest en 1997 avec Littoral, premiĂšre piĂšce de sa tĂ©tralogie Coissard, p. 7, quâil acquiert la reconnaissance de la critique et du public ainsi quâune renommĂ©e internationale Coissard, p. 15. Cela lui permet de retourner en France dans le cadre de la prĂ©sentation de sa piĂšce. Incendies, la deuxiĂšme piĂšce du Sang des promesses, sort le 14 mars 2003 au théùtre Hexagone et est publiĂ©e la mĂȘme annĂ©e aux Ă©ditions LemĂ©ac/Actes Sud Coissard, p. 7. La piĂšce obtient un immense succĂšs et est adaptĂ©e en russe en 2007 au théùtre Et cetera Ă Moscou Coissard, p. 15. En 2009, soit trois ans aprĂšs la sortie de ForĂȘts, le troisiĂšme volet de la tĂ©tralogie Coissard, p. 7, le metteur en scĂšne retourne pour une derniĂšre fois Ă lâunivers du Sang des promesses en concevant une nouvelle version de Littoral et en crĂ©ant Ciels, le quatriĂšme et ultime volet Coissard, p. 15. La mĂȘme annĂ©e, Incendies est rééditĂ©e dans la collection de poche Babel Coissard, p. 7. En 2010, Denis Villeneuve adapte la piĂšce au cinĂ©ma sous le mĂȘme titre[2]. Le film est prĂ©sentĂ© pour la premiĂšre fois Ă la 67e Mostra de Venise et est nominĂ© aux Oscars dans la catĂ©gorie du meilleur film en langue Ă©trangĂšre. De plus, il remporte neuf prix Ă la 13e cĂ©rĂ©monie des Jutra. PrĂ©sentation dâIncendies GenĂšse de lâĆuvre Dans la postface de lâĂ©dition de Babel parue en 2009, on apprend quâĂ lâorigine de la piĂšce Incendies il y a la prison Khiam[3]. Au dĂ©but de lâannĂ©e 2001, Mouawad invite JosĂ©e Lambert Ă un lundiduda », des reprĂ©sentations organisĂ©es chaque mois au théùtre de QuatâSous par Mouawad lui-mĂȘme p. 137. Photographe engagĂ©e, Lambert, au cours dâun voyage au Liban en 1995, prend en photo la prison de Khiam. Au lundiduda, Lambert raconte lâhistoire de la prison Ă Mouawad, qui nâen avait jamais entendu parler. Il sâagit dâune ancienne caserne française convertie en base de lâarmĂ©e, puis en prison en 1985 p. 138. Au cours de la guerre, des milliers de Libanais et de Palestiniens sont emprisonnĂ©s de maniĂšre arbitraire. Ce nâest quâen 2000 que la prison est finalement abandonnĂ©e, lorsquâIsraĂ«l se retire du Liban p. 138-139. Au fil de son rĂ©cit, Lambert en vient Ă raconter lâhistoire de Souha Bechara, emprisonnĂ©e Ă Khiam pour avoir tirĂ©e deux balles sur Antoine Lahad, le chef de lâArmĂ©e du Liban-Sud ALS p. 139. Ă la suite de sa rencontre avec JosĂ©e Lambert, Mouawad se plonge dans lâhistoire du Liban p. 143. Au fil de ses recherches, il dĂ©couvre les films documentaires de Randa Chahal Sabbag, une Libanaise vivant Ă Paris qui sâintĂ©resse Ă la guerre civile au Liban. Plus prĂ©cisĂ©ment, lâun de ces documentaires, intitulĂ© Souha, survivre Ă lâenfer, sâattarde, comme le titre lâindique, Ă la rĂ©sistante libanaise Souha Bechara. Mouawad Ă©crit alors Ă Sabbag et celle-ci lui fait parvenir une copie du film p. 144. En dĂ©couvrant Souha Bechara, Mouawad se dit quâelle est ce quâil aurait pu ĂȘtre sâil Ă©tait restĂ© au Liban, quâil pourrait ĂȘtre son jumeau p. 145. Il se rend alors Ă Paris pour rencontrer Sabbag, oĂč cette derniĂšre lui propose une rencontre avec Souha Bechara. Quand Mouawad se retrouve en prĂ©sence de Bechara, il nâa pas encore lu son livre RĂ©sistante qui dĂ©taille son expĂ©rience p. 149. Il mentionne Ă la rĂ©sistante quâil ignorait tout de Khiam avant tout rĂ©cemment et quâil a Ă©tĂ© choquĂ© dâapprendre que les bourreaux de Khiam vivaient au Canada aujourdâhui. Il parle aussi de lâhistoire qui lui est venue de tout cela lâhistoire dâune jeune fille amoureuse qui tombe enceinte et Ă qui on enlĂšve son enfant p. 150. Cette jeune fille quitte son village, sâinstruit, et devient journaliste. Quand la guerre Ă©clate, elle se joint Ă la rĂ©sistance. Lors dâune opĂ©ration, elle est capturĂ©e et enfermĂ©e. Quand les autres se font torturĂ©s, elle chante, et obtient alors le surnom de la femme qui chante. En prison, elle est violĂ©e plusieurs fois, tombe enceinte et accouche dâune fille. Quand elle est libĂ©rĂ©e, elle quitte le pays avec son enfant. Plus tard, elle apprend que son violeur est le fils quâelle cherchait. Quand elle lâapprend, elle cesse de parler. Câest en quittant Bechara que Mouawad se dit quâil serait intĂ©ressant pour la rĂ©sistante dâavoir des jumeaux plutĂŽt quâune fille p. 151. Ici, ceux qui ont lu Incendies reconnaĂźtront facilement les germes de ce quâallait devenir la piĂšce. On comprend ainsi que la rencontre de Mouawad avec JosĂ©e Lambert, puis avec Souha Bechara, a Ă©tĂ© une grande inspiration. RĂ©sumĂ© de la piĂšce MOUAWAD, Wajdi, Incendies Le sang des promesses, 2, nouvelle Ă©dition, MontrĂ©al, LemĂ©ac/Actes Sud, coll. Acte Sud Papiers », 2009. Quand Nawal Marwan meurt, Hermile Lebel, son ami, notaire et exĂ©cuteur testamentaire, prĂ©sente son testament Ă ses enfants, les jumeaux Jeanne et Simon Marwan. Selon les derniĂšres volontĂ©s de Nawal, une enveloppe est confiĂ©e Ă chacun dâeux. Jeanne doit remettre la sienne Ă leur pĂšre inconnu; Simon doit remettre la sienne Ă leur frĂšre dont ils ignoraient jusquâalors lâexistence. Tandis que Simon refuse dâabord de se prĂȘter au jeu, Jeanne, elle, part en quĂȘte de ses origines au Liban. LĂ -bas, au fil des rencontres, elle apprend que sa mĂšre a Ă©tĂ© emprisonnĂ©e Ă la prison de Kfar Rayat par le passĂ©, quâelle Ă©tait connue sous le nom de la femme qui chante » et que son pĂšre nâest nul autre quâAbou Tarek, le gardien de la prison qui a violĂ© sa mĂšre. AprĂšs cette dĂ©couverte, Simon part finalement en quĂȘte de leur frĂšre, accompagnĂ© dâHermile Lebel. Sa quĂȘte le mĂšne auprĂšs dâun individu nommĂ© Chamseddine, qui lui rĂ©vĂšle que leur frĂšre, Nihad Harmanni, nâest pas lâenfant nĂ© du viol de Nawal par Abou Tarek, que câest Jeanne et lui qui le sont. Il apprend quâils ont Ă©tĂ© dâabord recueilli par Chamseddine lui-mĂȘme, qui les a appelĂ© Janaane et Sarwane, et que Nihad, leur frĂšre, est aussi Abou Tarek, leur pĂšre. La vĂ©ritĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e, les jumeaux sâacquittent de leur derniĂšre tĂąche, remettant les deux lettres Ă Nihad/Abou Tarek. Enfin, Hermile Lebel, sous les instructions de Nawal, leur remet une lettre de la part de leur mĂšre, quâils lisent. Personnages Incendies comporte un total de 15 personnages, dont trois personnages piliers Nawal, Jeanne et Simon, trois personnages secondaires importants Hermile Lebel, Sawda et Nihad Harmanni/Abou Tarek et neuf personnages que lâon dira transitoires ». Nous nous attarderons davantage aux personnages centraux. Les autres personnages seront mentionnĂ©s ou dĂ©crits par rapport Ă la relation quâils entretiennent avec les personnages piliers. Nawal Marwan Nawal Marwan est le personnage central par excellence, car toute lâintrigue sâarticule autour dâelle, aussi bien dans le passĂ© que dans le prĂ©sent. Nawal naĂźt au Liban. Ă lâadolescence, elle entretient une relation amoureuse avec Wahab et tombe enceinte. Jihane, sa mĂšre, refuse quâelle garde lâenfant et elle est donc forcĂ©e de le donner Ă sa naissance. Peu de temps aprĂšs, Nazira, sa grand-mĂšre, meurt, mais pas avant de lui prodiguer des conseils. Bien quâelle apparaisse dans peu de scĂšnes, Nazira a une influence fondamentale sur lâavenir de Nawal. Câest en effet sur son conseil que celle-ci apprend Ă lire et Ă Ă©crire, entre autres pour pouvoir graver le nom de sa grand-mĂšre sur sa tombe, mais aussi pour rompre le cycle de la violence et de la haine par la connaissance. AprĂšs avoir gravĂ© le nom de sa grand-mĂšre, Nawal part Ă la recherche de son fils, accompagnĂ©e de Sawda. En chemin, elle Ă©duque la jeune femme et devient son amie. Elle est finalement enfermĂ©e Ă la prison de Kfar Rayat pour le meurtre du chef des milices, oĂč elle devient la femme qui chante », en mĂ©moire de Sawda qui chantait tout le temps. Elle est violĂ©e par le gardien de prison Abou Tarek, quâelle ignore alors ĂȘtre son fils, et tombe enceinte de Jeanne et Simon. Elle accouche en prison. Plus tard, aprĂšs la guerre, les jumeaux sous sa garde, elle dĂ©couvre en suivant le procĂšs dâAbou Tarek que son violeur est aussi son fils perdu, ce qui la plonge dans le silence. Au dĂ©but de la piĂšce, Nawal vient juste de mourir. Elle a nommĂ© Hermile Lebel comme exĂ©cuteur testamentaire et confie aux jumeaux, Ă travers son testament, une ultime quĂȘte. Jeanne Marwan Jeanne Marwan, fille de Nawal et sĆur jumelle de Simon, enseigne les mathĂ©matiques, et plus prĂ©cisĂ©ment la thĂ©orie des graphes, Ă lâuniversitĂ© oĂč elle prĂ©pare son doctorat. Elle est trĂšs affectĂ©e par la mort de sa mĂšre et dĂ©cide rapidement de partir Ă la recherche de son pĂšre et en quĂȘte de ses origines. Au fil de son parcours, Jeanne croise plusieurs personnages. Dâabord, il y a Antoine, lâinfirmier qui sâoccupait de Nawal Ă la fin de sa vie et celui qui a entendu ses derniers mots. AprĂšs la mort de Nawal, il va travailler pour un théùtre. Quand Jeanne vient le voir, il lâaide du mieux quâil peut pour orienter ses recherches et lui remet les enregistrements quâil a faits du silence de sa mĂšre. Jeanne rencontre ensuite Abdessamad, qui vient du mĂȘme village que Nawal. Ensuite, il y a Mansour, le guide de la prison de Kfar Rayat transformĂ©e en musĂ©e. Il la met sur la piste de Fahim, ancien gardien de la prison, reconverti en concierge. Il a Ă©tĂ© Ă©pargnĂ© aprĂšs la guerre quand on a appris ce quâil avait fait pour la femme qui chante. Quand celle-ci a accouchĂ©, plutĂŽt que de noyer son enfant il croit quâil nây en a quâun seul comme il le faisait pour les autres, il le remet Ă un paysan du nom de Malak. Malak, bien quâil nâapparaisse que dans une seule scĂšne, joue un rĂŽle pivot. En effet, câest lui qui apprend Ă Jeanne que lâancien gardien de prison nâa pas sauvĂ© un seul bĂ©bĂ©, son frĂšre inconnu, mais deux bĂ©bĂ©s, soit Simon et elle, quâil a nommĂ© Janaane et Sarwane. Il sâagit donc du personnage apprenant Ă Jeanne lâidentitĂ© de son pĂšre, soit Abou Tarek, celui qui dirigeait la prison oĂč sa mĂšre Ă©tait retenue. Simon Marwan Simon Marwan, fils de Nawal et frĂšre jumeau de Jeanne, est un boxeur qui cherche Ă en faire une carriĂšre professionnelle. Il en veut Ă sa mĂšre pour avoir sombrĂ© dans le silence et refuse dâabord dâaller Ă la recherche de son frĂšre. Finalement, aprĂšs avoir lu le tĂ©moignage de sa mĂšre dans le cahier rouge, Simon dĂ©cide de se lancer, aidĂ© dâHermile Lebel. Hermile Lebel est le notaire et ami de Nawal, qui lâa dĂ©signĂ© comme exĂ©cuteur testamentaire. Il est trĂšs affectĂ© par sa mort et est bien dĂ©cidĂ© Ă faire respecter ses derniĂšres volontĂ©s. Dans la piĂšce, il est mentionnĂ© quâil a rĂ©cemment changĂ© de bureau. Ă noter, ce personnage permet lâintroduction dâune touche dâhumour dans la piĂšce, entre autres par le dĂ©tournement dâexpressions communes. Au terme de sa quĂȘte, Simon rencontre Chamseddine, le chef de la rĂ©sistance du Sud. Tout comme pour Nazira ou Malak, ce personnage, bien que peu prĂ©sent physiquement », joue un rĂŽle clĂ© dans la piĂšce, puisque câest lui qui rĂ©vĂšle Ă Simon que son frĂšre perdu, Nihad Harmanni, est Ă©galement son pĂšre, Abou Tarek. Nihad Harmanni / Abou Tarek Le lecteur ou spectateur en vient donc Ă concilier les deux hommes qui ne font quâun. Nihad Harmanni, nommĂ© ainsi par ses parents adoptifs Roger et Souhayla Harmanni, devient tireur dâĂ©lite sous les ordres de Chamseddine. Il prend ensuite la route du Nord pour retrouver sa mĂšre, mais faute de succĂšs, est recrutĂ© par lâarmĂ©e Ă©trangĂšre oĂč il devient un tireur dâĂ©lite cruel, qui prend en photo ses victimes et qui se fait des faux spectacles dans un pseudo-anglais. Quand il est promu au poste de chef de la prison, Nihad devient Abou Tarek. FascinĂ© par la femme qui chante, il se garde de la tuer et la viole Ă rĂ©pĂ©tition. Ă son procĂšs, il Ă©voque le petit nez de clown, seule chose qui lui reste de sa mĂšre, et câest ainsi que Nawal, suivant les procĂ©dures, apprend que son violeur est aussi le fils quâelle a tant cherchĂ©, car elle avait laissĂ© Ă ce dernier un petit nez de clown. Analyse dramaturgique Notre analyse portera sur les Ă©lĂ©ments dramaturgiques de la piĂšce qui appartiennent au courant de lâextrĂȘme contemporain. Nous sommes toutefois conscient quâIncendies peut avoir des affinitĂ©s avec certains autres courants comme la postmodernitĂ© ou le théùtre dâArtaud. Nous avons ici fait le choix de nous concentrer sur son appartenance Ă lâextrĂȘme contemporain. Pour ĂȘtre plus prĂ©cis, notre analyse sâarticulera autour de quatre caractĂ©ristiques de lâextrĂȘme contemporain se retrouvant dans la piĂšce de Wajdi Mouawad le retour du rĂ©cit et du personnage, le refus de la catharsis, le rĂŽle central du traitement de la langue et lâĂ©clatement du temps et de lâespace. Retour du rĂ©cit et du personnage Avec lâextrĂȘme contemporain, on assiste Ă un retour du personnage et du rĂ©cit, lesquels avaient Ă©tĂ© dĂ©laissĂ©s au cours de la postmodernitĂ©. En ce qui concerne le personnage, cela signifie quâil est de nouveau dotĂ© dâune Ă©paisseur psychologique. Ainsi, chaque personnage a sa personnalitĂ© propre; le personnage nâest plus interchangeable. Dans Incendies, on diffĂ©rencie effectivement les personnages les uns des autres. Mouawad va mĂȘme plus loin dans le dĂ©veloppement de ses personnages principaux, puisquâil sâintĂ©resse Ă la quĂȘte des origines de Jeanne et Simon et au parcours de vie de Nawal. Pour ce qui est du retour du rĂ©cit, on mentionnera simplement que la piĂšce rompt avec la postmodernitĂ© par le simple fait quâelle raconte une histoire, ce qui la classe dans lâextrĂȘme contemporain. Ce qui caractĂ©rise normalement le rĂ©cit de lâextrĂȘme contemporain, câest lâabsence dâune fin bien dĂ©finie, lâhistoire Ă©tant plutĂŽt laissĂ©e en suspens pour que le spectateur soit libre de formuler sa propre fin. Toutefois, Incendies sâĂ©loigne de lâextrĂȘme contemporain en offrant une clĂŽture plutĂŽt conventionnelle, puisque la piĂšce sâachĂšve sur la fin du parcours initiatique des jumeaux et que ces derniers ont obtenu les rĂ©ponses Ă leurs questions relativement Ă leur origine. Refus de la catharsis Dans le théùtre de lâextrĂȘme contemporain, qui est pourtant parfois trĂšs violent, la catharsis nâopĂšre pas. Câest parce que la catharsis nĂ©cessite la reprĂ©sentation claire dâune figure du bien » et dâune figure du mal ». Dans le théùtre traditionnel, le spectateur peut facilement identifier le hĂ©ros du mĂ©chant, si bien quâil peut aisĂ©ment reconnaĂźtre lâexemple Ă ne pas suivre, ce qui est nĂ©cessaire pour que la catharsis fonctionne. Cependant, dans le théùtre de lâextrĂȘme contemporain, il est impossible de distinguer un hĂ©ros ou un mĂ©chant au sens habituel, car lâextrĂȘme contemporain porte lâidĂ©e que tout le monde est Ă la fois bourreau et victime. Incendies illustre bien cette idĂ©e, puisquâelle nous prĂ©sente plusieurs personnages apparemment rangĂ©s » dans le prĂ©sent, mais qui ont Ă©tĂ© coupables dâatrocitĂ©s par le passĂ©. On pensera notamment Ă Fahim et Chamseddine. Quant Ă Nihad/Abou Tarek, sâil est devenu cruel, on apprend toutefois que ce sont les circonstances de la vie quâil a menĂ© aprĂšs que Nawal ait Ă©tĂ© forcĂ©e de lâabandonner qui lâont rendu comme il est, si bien quâon ne peut le voir simplement comme un vilain. Dâautre part, lâidĂ©e que tout le monde est victime et bourreau est bien reprĂ©sentĂ©e dans la piĂšce par la formulation du cycle de la violence Ă la scĂšne 17 p. 60-64, oĂč un mĂ©decin explique Ă Nawal et Sawda que depuis des annĂ©es et des annĂ©es, un camp commet des atrocitĂ©s pour se venger des atrocitĂ©s commises par lâautre camp qui se vengeait lui-mĂȘme et ainsi de suite. Ici, ils sont donc tous bourreaux et victimes. Et câest parce que tout le monde dans Incendies est bourreau et victime, que personne nâest bon » ou mauvais » au sens traditionnel du terme et que la catharsis nâopĂšre pas dans la piĂšce. RĂŽle central du traitement de la langue La langue du théùtre de lâextrĂȘme contemporain ne se veut pas rĂ©aliste, câest-Ă -dire quâelle ne cherche pas Ă imiter la rĂ©alitĂ©. Il sâagit plutĂŽt dâune langue particuliĂšrement travaillĂ©e, qui est sculptĂ©e, poĂ©tique, théùtrale. Notamment, Incendies comporte plusieurs longues tirades et longs monologues tĂ©moignant de la primautĂ© du texte. Une autre caractĂ©ristique relativement au travail de la langue de lâextrĂȘme contemporain est lâemploi de tous les registres langagiers et de diffĂ©rentes langues. Dans la piĂšce, Mouawad Ă©crit tantĂŽt en français quĂ©bĂ©cois familier â qui inclut des insultes proprement quĂ©bĂ©coises â tantĂŽt dans un français standard soutenu. La scĂšne 2 p. 15-26 de la piĂšce met bien en Ă©vidence ce contraste, prĂ©sentant dâabord le testament de Nawal rĂ©digĂ© dans un parfait français, puis la tirade de Simon, qui parle dans un français quĂ©bĂ©cois populaire parsemĂ© de jurons. De mĂȘme, lâanglais et le français se cĂŽtoient dans le texte. Lâexemple le plus marquant est la scĂšne 33 intitulĂ©e Les principes dâun franc-tireur » p. 115-116, oĂč Nihad/Abou Tarek imite un prĂ©sentateur amĂ©ricain dans un anglais approximatif contaminĂ© par le français. Toutefois, câest gĂ©nĂ©ralement lâanglais qui vient contaminer le français, puisque le français quĂ©bĂ©cois, parlĂ© par les personnages de Jeanne et Simon, est naturellement Ă©maillĂ© dâanglicismes. Enfin, le travail de la langue se manifeste aussi dans Incendies dâune maniĂšre qui lui est propre Ă travers le personnage dâHermile Lebel, notamment par sa dĂ©formation des expressions courantes. DĂšs la premiĂšre page du texte, plutĂŽt que de dire la mer Ă boire », il dit la mer Ă voir » p. 13. Ainsi, Mouawad, grĂące Ă ce personnage, peut non seulement jouer avec la langue Ă loisir, mais peut Ă©galement insĂ©rer une touche dâhumour dans un rĂ©cit autrement trĂšs grave. Ăclatement de lâespace et du temps Incendies, dans la lignĂ©e de lâextrĂȘme contemporain, prĂ©sente un espace Ă©clatĂ©, câest-Ă -dire que le lecteur/spectateur ne sait pas trĂšs bien oĂč se dĂ©roule lâaction. Cet effet dâabstraction est notamment créé par une absence de nomination. Ainsi, jamais les pays ne sont nommĂ©s p. 151. Le Liban, par exemple, nâest jamais mentionnĂ© textuellement p. 153. On lâappelle plutĂŽt âle pays natalâ, âle paysâ, âle pays de votre mĂšreâ », etc. De plus, la description du pays en elle-mĂȘme est trĂšs abstraite, puisquâon situe les lieux en fonction des points cardinaux. Par exemple, NabatiyĂ© est simplement un village sur la route allant vers le Sud. Il faut noter que lâabstraction est maintenue mĂȘme si lâauteur Ă©voque quelques noms de lieux rĂ©els comme NabatiyĂ© et Kfar Matra, car il le fait en sachant quâil Ă©crit pour un public quĂ©bĂ©cois nâayant aucune connaissance de la gĂ©ographie libanaise p. 153-154. Il sâagit donc plus de clins dâĆil que dâautre chose. Enfin, on remarquera quâaucune appartenance nationale ou religieuse nâest nommĂ©e directement dans le texte. On se contente de les dĂ©signer de maniĂšre gĂ©nĂ©rique par les rĂ©fugiĂ©s », les miliciens », la rĂ©sistance de la rĂ©gion de Sud » et lâArmĂ©e du Sud » p. 154, ce qui contribue Ă lâabstraction gĂ©nĂ©rale. Lâespace nâest pas la seule chose qui soit Ă©clatĂ©e dans Incendies, le temps lâest aussi. Dâabord, le temps est Ă©clatĂ© dans le sens quâil ne sâĂ©coule pas de façon linĂ©aire. Ainsi, on ignore sur combien de temps sâĂ©chelonne lâhistoire et on ne sait pas combien de temps sâĂ©coule entre les diffĂ©rentes scĂšnes. De mĂȘme, il faut mentionner que la chronologie globale de lâhistoire ne correspond pas Ă celle de la guerre du Liban p. 155. De plus, Mouawad brouille encore un peu plus les repĂšres temporels en Ă©vitant de fournir des dates prĂ©cises p. 156. Le temps de la piĂšce est donc un temps dilatĂ©, Ă la signification symbolique p. 157, tel quâillustrĂ© par des repĂšres temporels abstraits comme Nous sommes au dĂ©but de la guerre de cent ans » p. 76. Enfin, Mouawad achĂšve dâĂ©clater le temps en entremĂȘlant les Ă©poques, alternant le rĂ©cit de Nawal au passĂ© et le rĂ©cit des jumeaux au prĂ©sent. Allant encore plus loin, il fait parfois se rencontrer les deux Ă©poques dans une mĂȘme scĂšne. Par exemple, dans la scĂšne 14 FrĂšre et sĆur » p. 53-57, non seulement on alterne entre Nawal/Sawda et Jeanne/Simon, mais Nawal et Sawda croisent Jeanne sur scĂšne. Jugement gĂ©nĂ©ral Selon nous, Incendies est lâune des meilleures piĂšces dâextrĂȘme contemporain des derniĂšres annĂ©es, car Wadji Mouawad parvient Ă tirer le maximum des procĂ©dĂ©s propres Ă lâextrĂȘme contemporain, notamment en ce qui concerne lâĂ©clatement de lâespace et du temps et le travail de la langue. Ainsi, le dramaturge mĂ©lange habilement passĂ© et prĂ©sent, toujours de maniĂšre Ă apporter une plus grande profondeur symbolique, sans que les transitions soient abruptes. Quant Ă la langue, non seulement Mouawad offre un texte bien rythmĂ© et trĂšs poĂ©tique, mais il exploite aussi pleinement le potentiel que lui offre un milieu comme le QuĂ©bec, une province bilingue qui parle un français fortement influencĂ© par lâanglais. Mouawad nâhĂ©site donc pas Ă utiliser tout le matĂ©riel langagier Ă sa disposition pour rendre son texte efficace, combinant français standard, français quĂ©bĂ©cois, anglais, langue populaire et langue soutenue selon lâagencement le plus harmonieux. Se procurer Incendies [1] Françoise Coissard, Wajdi Mouawad Incendies, Paris, HonorĂ© Campion, collection Entre les lignes littĂ©ratures Sud », 2014, p. 7. DĂ©sormais, les rĂ©fĂ©rences Ă ce texte seront indiquĂ©es entre parenthĂšses Ă la suite des citations, avec la mention Coissard ». [2] AllocinĂ©, Incendies », page consultĂ©e le 12 septembre 2018. [3] Wajdi Mouawad, Incendies â Le sang des promesses 2, MontrĂ©al, LemĂ©ac/Actes Sud, coll. Babel », 2011, p. 136. DĂ©sormais, les rĂ©fĂ©rences Ă ce texte seront indiquĂ©es entre parenthĂšses avec le numĂ©ro de page pertinent.
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c était quand la derniÚre fois piÚce de théùtre