ProgrammeTV > Théùtre > C'Ă©tait quand la derniĂšre fois ? Théùtre C'Ă©tait quand la derniĂšre fois ? Genre : Théùtre DurĂ©e : 95 minutes Avec Zinedine Soualem, Virginie Hocq PrĂ©sentĂ© par : Corinne Tong ChaĂŻ. RĂ©sumĂ©. Lors d'un dĂźner qui promettait d'ĂȘtre aussi morne que les autres, une femme annonce en souriant Ă  son mari qu'elle vient de l'empoisonner. Durant le laps de temps NOTE D’INTENTION C’est étrange de se sentir à la fois fort et au bord du gouffre. C’est ce que j’éprouve, et j’ignore laquelle de ces deux impressions est fausse ni l’une ni l’autre probablement. » Samuel Beckett, lettre à Pamela Mitchell Encore Beckett. Tant qu’il reste en lui des choses que je ne comprends pas, qui me sont obscures, étrangères, je crois que je peux le mettre en scène. Après Cap au pire. Après la dernière bande. Après L’image et Words and Music, Fin de partie donc la grande pièce de Beckett, sa préférée, celle qu’on n’ose pas aborder sans un certain bagage. Plus aboutie que Godot, moins rabâchée aussi peut- être. Se dire je vais monter Fin de partie, c’est un peu comme se dire je vais monter Hamlet Excitant et effrayant. Les métaphores maritimes abondent chez Beckett, l’Irlandais. Et j’ai en abordant Fin de partie, le sentiment d’accoster sur une île après avoir longtemps voyagé, avec mes précédentes mises en scène, sur une mer déconcertante, tantôt calme tantôt en furie. J’ai fait le voyage à l’envers commençant par l’un des derniers textes Cap au pire pour arriver à Fin de partie, que Beckett écrivit juste avant la Dernière bande. Après des années d’errance, Beckett est devenu un écrivain reconnu. Molloy a été publié. En attendant Godot a connu un succès international. Aborder Fin de partie, c’est me poser la question du théâtre, retrouver le théâtre, après m’être centré sur les mots et la musicalité Tout à coup, il faut voir les choses en grand. Quatre comédiens sur scène et un décor. Je retrouve l’excitation d’une première fois, la magie enfantine des trois coups et du théâtre de Guignol. Il y a de cela dans le début de Fin de partie Clov tirant les rideaux et soulevant les draps qui recouvrent Hamm et les poubelles de Nell et Nagg. C’est comme un petit théâtre, une scène qui tous les soirs commence et tous les soirs se termine, indéfiniment. Je n’ai pas envie d’exégèse et d’interprétations. Juste le plaisir des gestes et des mots. Regarder Denis Lavant et Frédéric Leidgens il faut de grands acteurs pour jouer Beckett, Clov et Hamm, le fils adoptif et le père ou le maître et le domestique On a pu dire que l’un incarnait le corps quand l’autre était l’âme, que l’un était James Joyce quand l’autre était Beckett, mais cela importe-t- il ?. Clov, bouge tout le temps et parle peu. Hamm est immobile et volubile. L’un est aveugle et paralytique, l’autre boiteux. Clov prend soin de Hamm. Hamm a autrefois pris soin de Clov. À moins que ce ne soit l’inverse. Ils passent leur temps à se chercher sans se trouver. Ils ne peuvent se détacher l’un de l’autre. La plus grande peur du tyrannique Hamm est que Clov le quitte. Clov exécute les ordres, parle de partir sans qu’on sache s’il passera à l’acte. On ne sait pas ce que pense Clov. Clov est une tombe. Avec eux, vivent, chacun dans une poubelle, Nagg et Nell, les parents de Hamm. Ils sont à la fin de leur vie mais pas encore morts. Parfois ils parlent et ce qu’ils ont à dire est beau et d’une tristesse infinie Qui appelais-tu, quand tu étais tout petit et avais peur, dans la nuit ? Ta mère? Non. Moi. On te laissait crier. Puis on t’éloigna, pour pouvoir dormir. Un temps. Je dormais, j’étais comme un roi, et tu m’as fait réveiller pour que je t’écoute. Ce n’était pas indispensable, tu n’avais pas vraiment besoin que je t’écoute. D’ailleurs je ne t’ai pas écouté. Un temps. J’espère que le jour viendra où tu auras vraiment besoin que je t’écoute, et besoin d’entendre ma voix, une voix. Un temps. Oui, j’espère que je vivrai jusque-là, pour t’entendre m’appeler comme lorsque tu étais tout petit, et avais peur, dans la nuit, et que j’étais ton seul espoir. » dit Nagg, autrefois patriarche, désormais réduit à vivre dans une poubelle dont il sort la tête uniquement suivant le bon-vouloir de son fils. Rarement, je crois, une pièce de théâtre n’a aussi lucidement et sobrement exposé les liens d’amour-haine qui lient les membres d’une famille. Strindberg et Ibsen sont dépassés haut-la-main. Clov, Hamm, Nell et Nagg vivent dans un espace indéfini. Un intérieur » dit Beckett dans sa didascalie, un intérieur doté de deux fenêtres donnant sur l’extérieur. Et c’est sans doute là pour moi, la gageure de ce spectacle représenter cet espace gris et immatériel et pourtant vivant, bruissant des bruits de la mer qu’on aperçoit par l’une des fenêtres, alors que l’autre donne sur la terre. Dans cet espace, gris noir clair » dit Clov !, la grande crainte des personnages est que la lumière les quitte définitivement. Sommes-nous sur Terre? Pas si sûr. Peut-être est-ce déjà le purgatoire, peut-être la maison est-elle sur un îlot, seul endroit encore peuplé après la fin du monde Beckett est le seul écrivain de ma connaissance qui sache faire de la science-fiction au théâtre. À la lumière d’aujourd’hui, le texte prend une étrange rĂ©sonance écologique. Hamm. – La nature nous a oubliés. Clov. – Il n’y a plus de – Plus de nature ! Tu vas fort. Clov. – Dans les Mais nous respirons, nousNous perdons nos cheveux, nos dents! Notre fraîcheur ! Nos idéaux !Clov. – Alors elle ne nous a pas oubliés. Peut-être aussi sommes-nous sur un bateau, Clov se sert d’une lunette » pour regarder au loin, Hamm réclame sa gaffe », accessoire indispensable à tout marin qui se respecte. Peut- être sommes-nous sur l’Arche de Noé, comme l’évoque James Knowlson, le grand biographe de Beckett Sur la terre à moitié engloutie par les eaux, la maison de Hamm est, comme l’Arche, un refuge contre la calamité du dehors ; au lieu de se découvrir bonnes dans les yeux de Dieu, les créatures de ce monde s’aperçoivent que la lumière meurt ; sur cette terre l’herbe ne pousse pas et les graines qu’a semées Clov ne germeront jamais » ». L’atmosphère fait aussi songer à celle du célèbre poème de Baudelaire Recueillement, maladroi- tement cité par Hamm à la fin de la pièce. Et, comme un long linceul traînant à l’Orient, / Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche. ». J’aimerais avec les acteurs trouver cette âpre douceur et une lucidité sans amertume. C’est étrange de se sentir à la fois fort et au bord du gouffre » dit Beckett dans une lettre à la femme qu’il aime au moment où il écrit Fin de partie. C’est cet équilibre entre le gouffre et la force, le sol qui se dérobe et ce qui fait qu’on tient debout qu’il s’agira de trouver. Rythmée par le temps de chaque chose le temps de se lever, de manger, de prendre son calmant, de raconter une histoire et le réveil auquel Clov se raccroche comme si c’était la seule chose encore tangible, Fin de partie dit la longue marche du temps. Sa fin et son éternel recommencement. Le texte dit aussi peut-être encore, ce qu’il ne dira plus dans Cap au pire le plaisir de raconter une histoire et de dire des mots dans un théâtre Le souffle qu’on retient et puis
 il expire. Puis parler, vite, des mots, comme l’enfant solitaire qui se met en plusieurs, deux, trois, pour être ensemble, et parler ensemble, dans la nuit. » Jacques Osinski BrunoGaccio, Ă  l'affiche de la piĂšce « Les pĂątes Ă  l'ail », dont il est l'auteur, au théùtre de la ScĂšne Parisienne, Ă©tait l’invitĂ© de ValĂ©rie Expert et Gilles Ganzmann sur Sud Une piĂšce pas comme les autres Ce dĂ©but d’annĂ©e a Ă©tĂ© chargĂ© pour les animateurs de la piĂšce. Les rĂ©pĂ©titions se sont multipliĂ©es, jusqu’à la derniĂšre semaine oĂč elles avaient lieu tous les aprĂšs-midis. C’est vraiment durant cette derniĂšre semaine que j’ai rĂ©ussi Ă  me familiariser avec mon personnage. Avant pour moi, c’était abstrait. Une fois dans le dĂ©cor et avec les costumes, ça devient rĂ©el » explique Michael Miraglia qui intĂšgre pour la premiĂšre fois la troupe du TĂ©lĂ©vie. 13 janvier, rĂ©pĂ©titions gĂ©nĂ©rales Ă  Nivelles Les animateurs ont rĂ©pĂ©tĂ© plusieurs fois leurs textes sous les conseils toujours avisĂ©s du metteur en scĂšne Jean-Paul Andret. Le stress monte pour Thomas Van Hamme. C’est la premiĂšre fois qu’il jouait la piĂšce en conditions rĂ©elles C’est dingue, on est tellement Ă  fond qu’on ne voit pas le temps passer. Quand ça se termine, on est crevĂ©. Mais c’est une bonne fatigue, c’est exaltant ». Jour J AprĂšs une bonne nuit de sommeil, le rendez-vous est fixĂ© Ă  18h pour une derniĂšre italienne Au théùtre, une italienne c’est une rĂ©pĂ©tition sans mettre le ton, avec une voix neutre qui permet aux acteurs de mĂ©moriser leurs textes sans se fatiguer » explique Jean-Paul Andret. AprĂšs une derniĂšre mise au point, les comĂ©diens se retrouvent dans les loges. Il y rĂšgne une vĂ©ritable effervescence. Plusieurs personnalitĂ©s de la chaĂźne viennent encourager leurs petits camarades. Derniers ajustements de costumes, vĂ©rification de chaque accessoire. Tout le monde y va de son commentaire amusant pour dĂ©tendre l’atmosphĂšre bouillonnante. On charrie Michael sur son costume gris qui colle parfaitement Ă  son personnage de jeune avocat dragueur. DerniĂšre interview avec la presse pour Jacques Van de Biggelaar. Il est presque 20h00. LevĂ©e de rideau dans 5 minutes ! Les comĂ©diens se rassemblent et poussent un cri de guerre pour s’encourager C’est un rituel trĂšs courant au théùtre et ça fait du bien, on est soudĂ© » dit Fanny Jandrain. C’est parti ! Michael Miraglia entre en scĂšne dans le rĂŽle de FrĂ©dĂ©ric sous les applaudissements du public trĂšs heureux de le dĂ©couvrir. Dans les coulisses, on guette les rires et les applaudissements des spectateurs. Ils ont tous le trac mais ils ont surtout hĂąte de monter sur scĂšne pour la premiĂšre fois. Michael, surexcitĂ©, raconte Ă  Fanny Jandrain C’est dingue ce qui m’arrive, si on m’avait dit que je ferais ça il y a un an, je ne l’aurais jamais cru, et en plus j’adore ça. Tu avais raison, c’est gĂ©nial comme sensation ». Enthousiaste, Fanny revient dans les coulisses aprĂšs son premier passage C’est fait les gars, on y est. Je suis trop contente » Pendant l’entracte, Jean Paul Andret revient en loge En un mot les amis, c’est tout simplement, GENIAL » Il fĂ©licite les acteurs et leur explique qu’ils ont trouvĂ© le bon rythme Continuez comme ça ! ». Thomas Van Hamme est impressionnĂ© par la performance de Luc Gilson Tu es Ă  fond dans ton rĂŽle, du coup c’est encore plus facile pour moi de jouer, je me laisse emporter ». Il faut dire que le rĂŽle interprĂ©tĂ© par Luc Gilson est extrĂȘmement physique, le rĂŽle principal de la piĂšce dans lequel il excelle particuliĂšrement. Au final, le public ravi a rĂ©compensĂ© les acteurs d’un tonnerre d’applaudissements
 de quoi commencer cette tournĂ©e sur une note positive ! CĂ©tait quand la derniĂšre fois ? - Théùtre Tristan Bernard Europe France Île-de-France Paris Paris - ActivitĂ©s Théùtre Tristan Bernard Théùtre Tristan Bernard Est-ce votre Ă©tablissement? 37 avis NÂș 581 sur 3 386 choses Ă  voir/Ă  faire Ă  Paris Concerts et spectacles, Théùtres 64 rue du Rocher, 75008 Paris, France Enregistrer Points forts des avis De bon matin, comme chaque matin, j'ai pris mon cartable pour partir Ă  l'Ă©cole. C'Ă©tait un beau matin de printemps. En chemin, lalalalĂšre, j'ai aidĂ© une trĂšs vieille dame Ă  lunettes Ă  traverser la rue. La boulangerie-tapisserie dĂ©roulait des kilomĂštre de gĂąteaux, d'Ă©clairs au chocolat, chaussons au pomme et pains au raisin. C'est alors que je l'ai aperçu, mon petit moineau, couchĂ© sur le cotĂ©, sans doute victime d'un accident de toiture, d'un rat de gouttiĂšre ou d'un mauvais coup de fusil...Les voix de trois garçon en coulisses. Julie Jim, Jules, JĂ©rĂ©mie, revenez ! J'ai trouvĂ© un petit moineau garçons apparaissent, traĂźnant des pieds. Ils se penchent vers les mains de Julie. Jules impassible Bah ! Nous les enfants, on a toujours des histoires d'oiseaux. Écoutez mes anges ! Un jour j'ai ramassĂ© un petit rouge- gorge mort. Je l'ai glissĂ© entre deux feuilles de peuplier, attachĂ©es avec un petit bout de ficelle et je l'ai enterrĂ© dans ce joli cercueil. Jim Moi un jour, j'ai entendu "poum" sur ma porte-fenĂȘtre. "Quel Ă©tourdi, cet Ă©tourneau", ai-je criĂ©! Il a failli casser ma vitre. DrĂŽle de façon de sonner Ă  la porte ! Jim Je lui ai mis un peu de glace sur le tĂȘte. Jules et JĂ©rĂ©mie Ben, la glace ... La vitre ... Jim s'Ă©cartant en marmonnant La glace, la vitre... La vitre, la glace ... Je ne vois pas. JĂ©rĂ©mie Et moi, un jour, en montagne, j'ai vu un aigle royal sur la neige. Il avait l'air d'un petit garçon perdu. Jim Oui... En autobus ! Les trois garçons s'esclaffent Julie ArrĂȘtez ! Vos bavardages tordus ne sont d'aucune utilitĂ©. Vous feriez mieux d'examiner mon moineau. L'oiseau inanimĂ© passe d'abord dans les mains de Jim. Jim d'un ton trĂšs professoral Voyons, voyons. Euh... A mon avis, tout vient des plumes. En effet, si cette particularitĂ© est douce au toucher... Large geste de caresse des plumes. ...elle fragilise l'individu. Jules J'ajouterais les pĂątes aussi. Regardez, fines comme des spaghettis. Les pauvres, elles m'ont tout l'air d'ĂȘtre cuites. JĂ©rĂ©mie Dommage. Pourtant, quel joli petit mec ! Ce doit ĂȘtre un jeune mĂąle. Julie ArrĂȘtez, on se croirait Ă  l'hĂŽpital. Nous n'avançons pas parce que nous ne parlons pas la langue des oiseaux. J'ai une idĂ©e. Si nous les imitons. Peut-ĂȘtre mon moineau nous comprendrait-il ! Jim Bonne idĂ©e. Je me jette Ă  l'eau. Il mime la dĂ©marche d'un hĂ©ron. Je suis un hĂ©ron. Pas mal, non ? Jules Et moi, mimant une chouette, je suis une ... une chouette. JĂ©rĂ©mie Et moi, mimant un coucou, un coucou ! Julie On t'Ă©coute, Jim ! Jim Un HĂ©ron au long bec emmanchĂ© d'un long cou Ă©tait Ă  l'affut de grosses nouilles. Ça va bouillir, ça va bouillir, se rĂ©jouissait dĂ©jĂ  l'Ă©chassier qui les chassa mais les rata, quittant la mare sans se marraient petit mot de Louise mĂȘme moi je n'ai rien compris Ă  cet espĂšce de poĂšme. Julie Mon moineau non plus. Essayons un autre oiseau. A toi, Jules ! Jules Bonjour je suis la chouette. Cherchez sous mes couvertures, vous ne me trouverez pas. Car sous les feuilles mon y est ! Vous, les souris, cessez de sourire ! Vers, ne jouez pas les poĂštes ! Et vous, les fourmis rouges, serrez les dents, serrez les rangs ! Alors ?? Julie Toujours rien. Un dernier essai ! Au tour de JĂ©rĂ©mie ! JĂ©rĂ©mie Voici Madame Ou-Ou ! Les autres Coucou ! Coucou ! JĂ©rĂ©mie Qui dĂ©pose son Ɠuf dans le nid de son choix SitĂŽt nĂ©, son poussin ... Les autres Coucou... Coucou ! JĂ©rĂ©mie ... Bouscule ses frĂ©rots Ă  l'aide de son dos. Ainsi les petits choient ... Les autres Hou... Hou ! JĂ©rĂ©mie ... de haut en bas, passant de vie Ă  trĂ©pas ! Les autres OulĂ , oulĂ , aĂŻe ! Julie Oh, bravo, JĂ©rĂ©mie ! Cette affreuse histoire de coucou a ranimĂ© mon moineau. Il veut fuir ce cauchemar. Regardez, il se rĂ©veille, il bat des ailes, il s'Ă©tire ! Les trois garçons Il va se tirer ! Julie Tant mieux ! Ça y est, il s'envole. Suivons-le ! Les quatre enfants battent des bras en piaillant, mais sans succĂšs. Julie On n'y arrivera jamais ! Jim Nous n'avons pas de plumes ! Jules Que des stylos ! Julie Dommage ! Quel beau voyage nous aurions pu faire, lĂ -haut, au-delĂ  des nuages ! Jim Jusqu'Ă  la lune ! JĂ©rĂ©mie Nous aurions traversĂ© fleuves et riviĂšre sans nous mouiller les chaussures. Jules Tout en dĂ©vorant des mouches et des moustiques. Jules Et nous aurions accompagnĂ© les cigognes jusqu'au dĂ©sert africain. Une cloche ou une sonnerie d'Ă©cole se fait entendre. Les enfants s'immobilisent et reprennent leurs cartables qu'ils installent avec peine sur leurs Ă©paules. Jim Fini de rĂȘver. l'Ă©cole a prĂ©vu de nos coller des cartables si lourds que nous ne pourrons jamais nos envoler. JĂ©rĂ©mie Dis donc, Jim, as-tu demandĂ© Ă  un moineau combien faisaient deux fois deux ? Jim Pas la peine, deux fois deux, ça fait quatre Ɠufs ! JĂ©rĂ©mie TrĂšs drĂŽles. Rassure-toi, si l'Ă©cole nous oblige Ă  garder les pieds sur terre, elle nous apprends aussi Ă  ĂȘtre des aigles en calcul, de chouettes en dessinateurs, des rossignol en poĂ©sie, des oiseaux migrateurs incollables en gĂ©ographie... Jules Mais aussi des martinets sans peur du martinet. Julie Des piafs au corps beau ! Jim Et des cygnes d'intelligence quand nous n'aurons plus besoin de compter sur nos doigts ! Tous Vite, on ne veut pas rater ça ! Ils disparaissent. Seule Julie reste en ScĂšne. Pour ĂȘtre un peu plus haute, elle monte sur son cartable, le visage tournĂ© vers le ciel. Julie OĂč est-il, maintenant, mon petit moineau ? Immobile comme une statue au sommet d'un arbre ? CachĂ© dans les fleurs des champs ? Ou alors mort de rire sous les chatouilles de la brise ? Vis ta vie d'oiseau. Je vivrai la mienne, sans elle, celle que tu passes lĂ -haut entre le ciel bleu et la planĂšte de notre Terre oĂč tu viens picorer tant de petites graines. Ton vol ne vole que dans nos rĂȘves et c'est bien ainsi. Merci ! FIN Dans le prochain article une seconde PiĂšce de théùtre toujours en provenance de ce livre. La9 Ăšme Ă©dition des Théùtrales de Casablanca entame la saison du printemps avec une nouvelle piĂšce alliant grands talents du théùtre et de la comĂ©die : « C’était quand la derniĂšre fois ? » sera sur les planches du Megarama Casablanca le jeudi 18 avril. SignĂ©e Emmanuel Robert-Espalieu et mise en scĂšne par la surdouĂ©e Johanna BoyĂ©, «C’était quand la derniĂšre
Disparitions Le directeur de l’OdĂ©on-Théùtre de l’Europe a succombĂ© Ă  une pneumonie, samedi 28 novembre, Ă  l’ñge de 67 ans. La nouvelle est tombĂ©e samedi 28 novembre, et un voile de tristesse s’est abattu sur le théùtre le metteur en scĂšne Luc Bondy, directeur de l’OdĂ©on-Théùtre de l’Europe, est mort d’une pneumonie, au matin de ce samedi, Ă  Zurich, Ă  67 ans. On le savait malade, mais la maladie faisait partie de sa vie, elle l’accompagnait depuis tant d’annĂ©es, et il la surmontait si bien qu’il apparaissait comme un phĂ©nix, toujours renaissant. En juillet, il Ă©tait parti pour la Suisse, pour se soigner. Il devait mettre en scĂšne Othello, de Shakespeare, Ă  partir de fin janvier 2016. Il avait repoussĂ© Ă  la saison prochaine ce spectacle dont il parlait magnifiquement, comme toujours quand il prĂ©parait une crĂ©ation. C’était un oiseau aux couleurs de paradis, pour reprendre l’expression de son ami Peter Stein, avec qui il a travaillĂ© Ă  la SchaubĂŒhne de Berlin, dans les annĂ©es 1980 un homme multiple, changeant, brillant, limpide et insaisissable. Son théùtre lui ressemblait virevoltant de vie, pressĂ© de dĂ©sirs, teintĂ© d’ombres fugitives, dont l’une Ă©tait celle de l’Histoire. Luc Bondy appartenait Ă  une famille juive issue de la Mitteleuropa. Son grand-pĂšre, Fritz Bondy, avait dirigĂ© le Théùtre de Prague, et connu Kafka. Son pĂšre, François Bondy, journaliste et intellectuel, s’était rĂ©fugiĂ© Ă  Zurich pour fuir le nazisme. C’est lĂ  que Luc Bondy naĂźt, le 17 juillet 1948. Mais c’est en France qu’il passe la plus grande partie de son enfance et de son adolescence. Dans l’appartement familial, il croise les amis de son pĂšre, EugĂšne Ionesco, Witold Gombrowicz, Marguerite Duras, Cioran, parmi beaucoup d’autres. Il les Ă©coute, se nourrit de leurs histoires, n’ose pas parler. Mais il retient tout, les voix, les gestes, les anecdotes. Sans le savoir, il se nourrit de ce théùtre de la vie qu’il n’a jamais cessĂ© d’aimer par la suite. Puis viennent les annĂ©es loin de Paris, dans un pensionnat des PyrĂ©nĂ©es oĂč Luc Bondy attend que le temps passe. Il ne tient pas en place en cours, il est mauvais Ă©lĂšve, et il se demande ce qu’il va faire, quand il arrĂȘte son cursus, sans avoir eu le bac. De retour Ă  Paris, il entend parler de l’école Jacques Lecoq, une fameuse pĂ©piniĂšre, oĂč l’on ne compte pas ceux qui y sont passĂ©s, d’Ariane Mnouchkine Ă  Christoph Marthaler. Cette Ă©cole lui apprend qu’il doit voler de ses propres ailes. Il s’en va, part pour l’Allemagne, en 1969. Luc Bondy a 21 ans. C’est le grand saut. Il dĂ©couvre un pays oĂč les ruines de la seconde guerre mondiale sont encore prĂ©sentes. Et il commence Ă  travailler dans le théùtre. DĂ©jĂ , il se dĂ©marque. Il saute les Ă©tapes, qui imposent d’ordinaire une longue formation Ă  la mise en scĂšne en tant qu’assistant. DĂšs 1971, il signe ses premiers spectacles, Le Fou et la nonne, de Witkiewicz, Ă  Göttingen, et Les Bonnes, de Genet, Ă  Hambourg. Rainer Werner Fassbinder vient les voir. SĂ©duit, il confie Ă  Luc Bondy sa piĂšce LibertĂ© Ă  BrĂȘme. A 26 ans, Fassbinder est dĂ©jĂ  connu. Les critiques des grands journaux allemands se dĂ©placent pour assister Ă  la crĂ©ation de LibertĂ© Ă  BrĂȘme, qui a lieu en 1972 Ă  Nuremberg. Ils dĂ©couvrent un metteur en scĂšne. La carriĂšre de Luc Bondy est lancĂ©e. Dans les annĂ©es suivantes, il met en scĂšne BĂŒchner, Ionesco, Goethe ou Edward Bond. Son style le dĂ©marque, sa renommĂ©e grandit vite. Elle le mĂšne au dĂ©but des annĂ©es 1980 Ă  la SchaubĂŒhne de Berlin. C’est la gloire. CrĂ©er comme si c’était la derniĂšre fois La SchaubĂŒne est la scĂšne la plus importante d’Europe. Si elle est organisĂ©e comme un collectif, elle est en fait dirigĂ©e par Peter Stein, qui a repĂ©rĂ© Luc Bondy. La rejoindre, c’est travailler avec les plus grands comĂ©diens, Jutta Lampe, Edith Clever, Angela Winkler, Otto Sander et Bruno Ganz, les deux anges des Ailes du dĂ©sir, le film de Wim Wenders. C’est aussi se confronter Ă  des metteurs en scĂšne d’exception, aux styles radicalement diffĂ©rents, Peter Stein et Klaus MichaĂ«l GrĂŒber. C’est enfin rejoindre Berlin, la ville dĂ©chirĂ©e par le Mur, oĂč l’on vit avec une intensitĂ© unique en Allemagne. Luc Bondy s’y sent chez lui. A la SchaubĂŒhne, il rencontre Botho Strauss, le dramaturge de la troupe, qui devient un compagnon de route de son théùtre, et un ami. Il crĂ©e plusieurs de ses piĂšces Kalldewey, La Guide, Le Temps et la chambre
 et continuera par la suite. Ce temps est aussi celui oĂč Luc Bondy apprend la maladie. Il est atteint d’un cancer. Peter Stein lui dit Surtout, tu travailles, tu continues, on t’aidera. » Luc Bondy surmonte l’épreuve. La connaĂźtre aussi jeune donne un autre ton Ă  la vie. Cette nĂ©cessitĂ© d’ĂȘtre dans l’instant, et de crĂ©er comme si c’était la derniĂšre fois, marque toute la trajectoire, et les mises en scĂšne de Luc Bondy, qui aura un autre cancer, et bien d’autres attaques
 La maladie n’était pas un tabou chez lui. Il en parlait, la combattait avec un Ă©tat d’esprit exceptionnel. Il la mettait dans la vie, dont il jouissait, et qui lui a donnĂ© deux enfants, les jumeaux EloĂŻse et Emmanuel, de son mariage avec la metteuse en scĂšne Marie-Louise Bischofberger. Mais revenons Ă  la SchaubĂŒhne. C’est dans ces annĂ©es-lĂ  que Luc Bondy fait ses dĂ©buts en France, oĂč l’invite Patrice ChĂ©reau, qui dirige le Théùtre de Nanterre-Amandiers. Sa premiĂšre crĂ©ation, Terre Ă©trangĂšre, d’Arthur Schnitzler, en 1984, est un Ă©vĂ©nement qui marque la dĂ©cennie redĂ©couverte d’un auteur, dĂ©couverte d’un metteur en scĂšne. A partir de ce moment-lĂ , Luc Bondy se partage entre Paris et Berlin. Toujours entre deux avions, deux projets, plusieurs vies. Un appĂ©tit de lecture inextinguible Ses amitiĂ©s sont nombreuses, sa soif de rencontres ne tarit jamais, son appĂ©tit de lecture, attisĂ© par l’insomnie, est inextinguible oĂč qu’il aille, il a un livre Ă  la main, que souvent il donne, quand il l’a lu. Il Ă©crit, aussi, de beaux livres A ma fenĂȘtre, chez Bourgois, en 2009 ; Dites-moi qui je suis, chez Grasset, en 1999
. Comme il l’a toujours fait, il continue, agrandit son cercle de mises en scĂšne, de villes, de fonctions. De 1985 Ă  1987, il succĂšde Ă  Peter Stein Ă  la direction de la SchaubĂŒhne de Berlin. De 2003 Ă  2013, il dirige les Wiener Festwochen, le prestigieux festival de Vienne. En mars 2012, l’annonce de sa nomination Ă  l’OdĂ©on-Théùtre de l’Europe, Ă  Paris, en remplacement d’Olivier Py, suscite une polĂ©mique. Luc Bondy fait front. Il fait toujours front, Ă  sa maniĂšre. Soit par l’attaque, soit par l’esquive. Il a l’intelligence vive, et il sait la force de son art qui en fait un des premiers metteurs en scĂšne en Europe, au théùtre et Ă  l’opĂ©ra, oĂč il a signĂ© de belles productions, en particulier Hercules musique de Haendel, Le Tour d’écrou musique de Benjamin Britten ou Julie musique de Philippe Boesmans. Sur sa route, dans les annĂ©es 1990 et 2000, il y a son ami Peter Handke, Ibsen, Guitry, Racine, Beckett, Yasmina Reza, Martin Crimp, Ionesco, Marivaux, MoliĂšre
 Luc Bondy aimait varier les genres et aurait aimĂ© redorer le blason du théùtre dit de boulevard. On pourrait s’arrĂȘter sur nombre de ses mises en scĂšne. Il en a signĂ© une soixantaine. Lire aussi La carriĂšre inĂ©gale de Luc Bondy Ă  l’opĂ©ra Laissons venir quelques souvenirs le bruit des balles sur le terrain de tennis qui servait de dĂ©cor Ă  Terre Ă©trangĂšre ; le son des pas de John Gabriel Borkman, reclus dans son grenier, dans la piĂšce d’Ibsen du mĂȘme nom ; la vibration fĂ©brile de l’air, dans La Mouette, quand Arkadina comprend qu’elle est trompĂ©e par son amant Trigorine. Laissons entrer les acteurs, Bulle Ogier, Michel Piccoli, Jutta Lampe, Micha Lescot, Gert Voss, Bruno Ganz, Isabelle Huppert
 Chaque crĂ©ation de Luc Bondy avait une couleur. Toutes reposaient avant tout sur les distributions, que le metteur en scĂšne choisissaient avec un soin extrĂȘme. Il disait d’ailleurs que quand le choix des acteurs Ă©tait fait, 80 % du travail l’était. C’était Ă©videmment Ă  la fois vrai et faux, comme tout ce qu’il dĂ©clarait la valeur de ses propos tenait Ă  l’instant oĂč il les exprimait. Ils Ă©taient Ă©phĂ©mĂšres, Ă  l’image du théùtre, que Luc Bondy ne cherchait pas Ă  rĂ©volutionner. Il l’habitait, Ă  la façon d’une maison oĂč tout vibre, tout bruit, crie ou chuchote, pleure ou aime. C’est cela qui Ă©tait beau, dans ses mises en scĂšne. Entendre et sentir tous les palpitements de la vie. Brigitte Salino Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil Ă  la fois Ce message s’affichera sur l’autre appareil. DĂ©couvrir les offres multicomptes Parce qu’une autre personne ou vous est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil. Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil Ă  la fois ordinateur, tĂ©lĂ©phone ou tablette. Comment ne plus voir ce message ? En cliquant sur » et en vous assurant que vous ĂȘtes la seule personne Ă  consulter Le Monde avec ce compte. Que se passera-t-il si vous continuez Ă  lire ici ? Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connectĂ© avec ce compte. Y a-t-il d’autres limites ? Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant Ă  des moments diffĂ©rents. Vous ignorez qui est l’autre personne ? Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.
AprĂšs3 festivals Ă  guichet fermĂ© au Théùtre des BĂ©liers, plus de 1000 reprĂ©sentations Ă  Paris et un triomphe Ă  Lyon la saison derniĂšre, la comĂ©die de Fabienne Galula, mise en scĂšne par Jean-Philippe AzĂ©ma (Entrez sans frapper) est de retour au théùtre avec sa distribution 100% lyonnaise.Bienvenue au paradis des gommettes, des doudous et des anti-dĂ©presseurs ! Notre ancienne GAEL Guest repart en tournĂ©e pour vous faire rire aux Ă©clats avec son nouveau spectacle “C’était quand la derniĂšre fois?”.Cet automne, Virginie Hocq fera une tournĂ©e des théùtres belges avec Zinedine Soualem. Les deux humoristes partagent l’affiche de “C’était quand la derniĂšre fois”, une piĂšce signĂ©e Emmanuel pitch Quoi de plus efficace pour rĂ©gler un problĂšme que de s’en dĂ©barrasser de maniĂšre dĂ©finitive » ? Un soir, comme tous les soirs de sa petite vie bien ordonnĂ©e, une femme va commettre le pire l’indicible et inavouable acte, d’empoisonner, de mettre Ă  mort son mari. Une comĂ©die dĂ©lirante et bien sĂ»r pleine de le contenu insĂ©rĂ© d'un rĂ©seau de mĂ©dias sociaux qui souhaite Ă©crire ou lire des cookies. 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Traitant, entre autres, de la question des origines, du cycle de la haine et de la violence inhĂ©rente Ă  la guerre ainsi que du pouvoir de la connaissance, la piĂšce Incendies, sortie en 2003, deuxiĂšme volet de la tĂ©tralogie Le Sang des promesses, a connu un succĂšs international. Incendies est donc une piĂšce importante dans le paysage du théùtre de l’extrĂȘme contemporain. C’est pourquoi nous avons dĂ©cidĂ© de nous intĂ©resser de plus prĂšs Ă  cette piĂšce. Wadji Mouawad Wajdi Mouawad est dramaturge et metteur en scĂšne quĂ©bĂ©cois[1]. NĂ© au Liban le 16 octobre 1968 Coissard, p. 11, il devient enfant-soldat trĂšs jeune Coissard, p. 12. Il reste Ă  la solde des miliciens jusqu’à ses huit ans, moment oĂč ses parents dĂ©cident de quitter le pays. Ils s’établissent alors en France. En 1983, lorsque Mouawad a 15 ans, la famille quitte la France pour le QuĂ©bec. Au QuĂ©bec, Mouawad obtient son diplĂŽme de l’École Nationale de Théùtre du Canada en 1991. AprĂšs sa sortie de l’école, il cofonde le Théùtre Ô Parleur avec Isabelle Leblanc et dĂ©bute immĂ©diatement sa carriĂšre de metteur en scĂšne avec deux piĂšces Ă©crites par son frĂšre, soit Al Malja en 1991 et L’Exil en 1992 Coissard, p. 12-13. De cette Ă©poque Ă  aujourd’hui, Mouawad monte une foule de piĂšces de genres variĂ©s, dont des piĂšces qu’il a Ă©crites lui-mĂȘme Coissard, p. 14. DĂšs 1991, il met en scĂšne un texte Ă  lui, soit Partie de cache-cache entre deux TchĂ©coslovaques au dĂ©but du siĂšcle Coissard, p. 14-15. MOUAWAD, Wajdi, Incendies Le sang des promesses, 2, MontrĂ©al, LemĂ©ac/Actes Sud, coll. Babel », 2011. Cependant, Mouawad est principalement connu pour sa tĂ©tralogie théùtrale Le Sang des promesses. Ainsi, c’est en 1997 avec Littoral, premiĂšre piĂšce de sa tĂ©tralogie Coissard, p. 7, qu’il acquiert la reconnaissance de la critique et du public ainsi qu’une renommĂ©e internationale Coissard, p. 15. Cela lui permet de retourner en France dans le cadre de la prĂ©sentation de sa piĂšce. Incendies, la deuxiĂšme piĂšce du Sang des promesses, sort le 14 mars 2003 au théùtre Hexagone et est publiĂ©e la mĂȘme annĂ©e aux Ă©ditions LemĂ©ac/Actes Sud Coissard, p. 7. La piĂšce obtient un immense succĂšs et est adaptĂ©e en russe en 2007 au théùtre Et cetera Ă  Moscou Coissard, p. 15. En 2009, soit trois ans aprĂšs la sortie de ForĂȘts, le troisiĂšme volet de la tĂ©tralogie Coissard, p. 7, le metteur en scĂšne retourne pour une derniĂšre fois Ă  l’univers du Sang des promesses en concevant une nouvelle version de Littoral et en crĂ©ant Ciels, le quatriĂšme et ultime volet Coissard, p. 15. La mĂȘme annĂ©e, Incendies est rééditĂ©e dans la collection de poche Babel Coissard, p. 7. En 2010, Denis Villeneuve adapte la piĂšce au cinĂ©ma sous le mĂȘme titre[2]. Le film est prĂ©sentĂ© pour la premiĂšre fois Ă  la 67e Mostra de Venise et est nominĂ© aux Oscars dans la catĂ©gorie du meilleur film en langue Ă©trangĂšre. De plus, il remporte neuf prix Ă  la 13e cĂ©rĂ©monie des Jutra. PrĂ©sentation d’Incendies GenĂšse de l’Ɠuvre Dans la postface de l’édition de Babel parue en 2009, on apprend qu’à l’origine de la piĂšce Incendies il y a la prison Khiam[3]. Au dĂ©but de l’annĂ©e 2001, Mouawad invite JosĂ©e Lambert Ă  un lundiduda », des reprĂ©sentations organisĂ©es chaque mois au théùtre de Quat’Sous par Mouawad lui-mĂȘme p. 137. Photographe engagĂ©e, Lambert, au cours d’un voyage au Liban en 1995, prend en photo la prison de Khiam. Au lundiduda, Lambert raconte l’histoire de la prison Ă  Mouawad, qui n’en avait jamais entendu parler. Il s’agit d’une ancienne caserne française convertie en base de l’armĂ©e, puis en prison en 1985 p. 138. Au cours de la guerre, des milliers de Libanais et de Palestiniens sont emprisonnĂ©s de maniĂšre arbitraire. Ce n’est qu’en 2000 que la prison est finalement abandonnĂ©e, lorsqu’IsraĂ«l se retire du Liban p. 138-139. Au fil de son rĂ©cit, Lambert en vient Ă  raconter l’histoire de Souha Bechara, emprisonnĂ©e Ă  Khiam pour avoir tirĂ©e deux balles sur Antoine Lahad, le chef de l’ArmĂ©e du Liban-Sud ALS p. 139. À la suite de sa rencontre avec JosĂ©e Lambert, Mouawad se plonge dans l’histoire du Liban p. 143. Au fil de ses recherches, il dĂ©couvre les films documentaires de Randa Chahal Sabbag, une Libanaise vivant Ă  Paris qui s’intĂ©resse Ă  la guerre civile au Liban. Plus prĂ©cisĂ©ment, l’un de ces documentaires, intitulĂ© Souha, survivre Ă  l’enfer, s’attarde, comme le titre l’indique, Ă  la rĂ©sistante libanaise Souha Bechara. Mouawad Ă©crit alors Ă  Sabbag et celle-ci lui fait parvenir une copie du film p. 144. En dĂ©couvrant Souha Bechara, Mouawad se dit qu’elle est ce qu’il aurait pu ĂȘtre s’il Ă©tait restĂ© au Liban, qu’il pourrait ĂȘtre son jumeau p. 145. Il se rend alors Ă  Paris pour rencontrer Sabbag, oĂč cette derniĂšre lui propose une rencontre avec Souha Bechara. Quand Mouawad se retrouve en prĂ©sence de Bechara, il n’a pas encore lu son livre RĂ©sistante qui dĂ©taille son expĂ©rience p. 149. Il mentionne Ă  la rĂ©sistante qu’il ignorait tout de Khiam avant tout rĂ©cemment et qu’il a Ă©tĂ© choquĂ© d’apprendre que les bourreaux de Khiam vivaient au Canada aujourd’hui. Il parle aussi de l’histoire qui lui est venue de tout cela l’histoire d’une jeune fille amoureuse qui tombe enceinte et Ă  qui on enlĂšve son enfant p. 150. Cette jeune fille quitte son village, s’instruit, et devient journaliste. Quand la guerre Ă©clate, elle se joint Ă  la rĂ©sistance. Lors d’une opĂ©ration, elle est capturĂ©e et enfermĂ©e. Quand les autres se font torturĂ©s, elle chante, et obtient alors le surnom de la femme qui chante. En prison, elle est violĂ©e plusieurs fois, tombe enceinte et accouche d’une fille. Quand elle est libĂ©rĂ©e, elle quitte le pays avec son enfant. Plus tard, elle apprend que son violeur est le fils qu’elle cherchait. Quand elle l’apprend, elle cesse de parler. C’est en quittant Bechara que Mouawad se dit qu’il serait intĂ©ressant pour la rĂ©sistante d’avoir des jumeaux plutĂŽt qu’une fille p. 151. Ici, ceux qui ont lu Incendies reconnaĂźtront facilement les germes de ce qu’allait devenir la piĂšce. On comprend ainsi que la rencontre de Mouawad avec JosĂ©e Lambert, puis avec Souha Bechara, a Ă©tĂ© une grande inspiration. RĂ©sumĂ© de la piĂšce MOUAWAD, Wajdi, Incendies Le sang des promesses, 2, nouvelle Ă©dition, MontrĂ©al, LemĂ©ac/Actes Sud, coll. Acte Sud Papiers », 2009. Quand Nawal Marwan meurt, Hermile Lebel, son ami, notaire et exĂ©cuteur testamentaire, prĂ©sente son testament Ă  ses enfants, les jumeaux Jeanne et Simon Marwan. Selon les derniĂšres volontĂ©s de Nawal, une enveloppe est confiĂ©e Ă  chacun d’eux. Jeanne doit remettre la sienne Ă  leur pĂšre inconnu; Simon doit remettre la sienne Ă  leur frĂšre dont ils ignoraient jusqu’alors l’existence. Tandis que Simon refuse d’abord de se prĂȘter au jeu, Jeanne, elle, part en quĂȘte de ses origines au Liban. LĂ -bas, au fil des rencontres, elle apprend que sa mĂšre a Ă©tĂ© emprisonnĂ©e Ă  la prison de Kfar Rayat par le passĂ©, qu’elle Ă©tait connue sous le nom de la femme qui chante » et que son pĂšre n’est nul autre qu’Abou Tarek, le gardien de la prison qui a violĂ© sa mĂšre. AprĂšs cette dĂ©couverte, Simon part finalement en quĂȘte de leur frĂšre, accompagnĂ© d’Hermile Lebel. Sa quĂȘte le mĂšne auprĂšs d’un individu nommĂ© Chamseddine, qui lui rĂ©vĂšle que leur frĂšre, Nihad Harmanni, n’est pas l’enfant nĂ© du viol de Nawal par Abou Tarek, que c’est Jeanne et lui qui le sont. Il apprend qu’ils ont Ă©tĂ© d’abord recueilli par Chamseddine lui-mĂȘme, qui les a appelĂ© Janaane et Sarwane, et que Nihad, leur frĂšre, est aussi Abou Tarek, leur pĂšre. La vĂ©ritĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e, les jumeaux s’acquittent de leur derniĂšre tĂąche, remettant les deux lettres Ă  Nihad/Abou Tarek. Enfin, Hermile Lebel, sous les instructions de Nawal, leur remet une lettre de la part de leur mĂšre, qu’ils lisent. Personnages Incendies comporte un total de 15 personnages, dont trois personnages piliers Nawal, Jeanne et Simon, trois personnages secondaires importants Hermile Lebel, Sawda et Nihad Harmanni/Abou Tarek et neuf personnages que l’on dira transitoires ». Nous nous attarderons davantage aux personnages centraux. Les autres personnages seront mentionnĂ©s ou dĂ©crits par rapport Ă  la relation qu’ils entretiennent avec les personnages piliers. Nawal Marwan Nawal Marwan est le personnage central par excellence, car toute l’intrigue s’articule autour d’elle, aussi bien dans le passĂ© que dans le prĂ©sent. Nawal naĂźt au Liban. À l’adolescence, elle entretient une relation amoureuse avec Wahab et tombe enceinte. Jihane, sa mĂšre, refuse qu’elle garde l’enfant et elle est donc forcĂ©e de le donner Ă  sa naissance. Peu de temps aprĂšs, Nazira, sa grand-mĂšre, meurt, mais pas avant de lui prodiguer des conseils. Bien qu’elle apparaisse dans peu de scĂšnes, Nazira a une influence fondamentale sur l’avenir de Nawal. C’est en effet sur son conseil que celle-ci apprend Ă  lire et Ă  Ă©crire, entre autres pour pouvoir graver le nom de sa grand-mĂšre sur sa tombe, mais aussi pour rompre le cycle de la violence et de la haine par la connaissance. AprĂšs avoir gravĂ© le nom de sa grand-mĂšre, Nawal part Ă  la recherche de son fils, accompagnĂ©e de Sawda. En chemin, elle Ă©duque la jeune femme et devient son amie. Elle est finalement enfermĂ©e Ă  la prison de Kfar Rayat pour le meurtre du chef des milices, oĂč elle devient la femme qui chante », en mĂ©moire de Sawda qui chantait tout le temps. Elle est violĂ©e par le gardien de prison Abou Tarek, qu’elle ignore alors ĂȘtre son fils, et tombe enceinte de Jeanne et Simon. Elle accouche en prison. Plus tard, aprĂšs la guerre, les jumeaux sous sa garde, elle dĂ©couvre en suivant le procĂšs d’Abou Tarek que son violeur est aussi son fils perdu, ce qui la plonge dans le silence. Au dĂ©but de la piĂšce, Nawal vient juste de mourir. Elle a nommĂ© Hermile Lebel comme exĂ©cuteur testamentaire et confie aux jumeaux, Ă  travers son testament, une ultime quĂȘte. Jeanne Marwan Jeanne Marwan, fille de Nawal et sƓur jumelle de Simon, enseigne les mathĂ©matiques, et plus prĂ©cisĂ©ment la thĂ©orie des graphes, Ă  l’universitĂ© oĂč elle prĂ©pare son doctorat. Elle est trĂšs affectĂ©e par la mort de sa mĂšre et dĂ©cide rapidement de partir Ă  la recherche de son pĂšre et en quĂȘte de ses origines. Au fil de son parcours, Jeanne croise plusieurs personnages. D’abord, il y a Antoine, l’infirmier qui s’occupait de Nawal Ă  la fin de sa vie et celui qui a entendu ses derniers mots. AprĂšs la mort de Nawal, il va travailler pour un théùtre. Quand Jeanne vient le voir, il l’aide du mieux qu’il peut pour orienter ses recherches et lui remet les enregistrements qu’il a faits du silence de sa mĂšre. Jeanne rencontre ensuite Abdessamad, qui vient du mĂȘme village que Nawal. Ensuite, il y a Mansour, le guide de la prison de Kfar Rayat transformĂ©e en musĂ©e. Il la met sur la piste de Fahim, ancien gardien de la prison, reconverti en concierge. Il a Ă©tĂ© Ă©pargnĂ© aprĂšs la guerre quand on a appris ce qu’il avait fait pour la femme qui chante. Quand celle-ci a accouchĂ©, plutĂŽt que de noyer son enfant il croit qu’il n’y en a qu’un seul comme il le faisait pour les autres, il le remet Ă  un paysan du nom de Malak. Malak, bien qu’il n’apparaisse que dans une seule scĂšne, joue un rĂŽle pivot. En effet, c’est lui qui apprend Ă  Jeanne que l’ancien gardien de prison n’a pas sauvĂ© un seul bĂ©bĂ©, son frĂšre inconnu, mais deux bĂ©bĂ©s, soit Simon et elle, qu’il a nommĂ© Janaane et Sarwane. Il s’agit donc du personnage apprenant Ă  Jeanne l’identitĂ© de son pĂšre, soit Abou Tarek, celui qui dirigeait la prison oĂč sa mĂšre Ă©tait retenue. Simon Marwan Simon Marwan, fils de Nawal et frĂšre jumeau de Jeanne, est un boxeur qui cherche Ă  en faire une carriĂšre professionnelle. Il en veut Ă  sa mĂšre pour avoir sombrĂ© dans le silence et refuse d’abord d’aller Ă  la recherche de son frĂšre. Finalement, aprĂšs avoir lu le tĂ©moignage de sa mĂšre dans le cahier rouge, Simon dĂ©cide de se lancer, aidĂ© d’Hermile Lebel. Hermile Lebel est le notaire et ami de Nawal, qui l’a dĂ©signĂ© comme exĂ©cuteur testamentaire. Il est trĂšs affectĂ© par sa mort et est bien dĂ©cidĂ© Ă  faire respecter ses derniĂšres volontĂ©s. Dans la piĂšce, il est mentionnĂ© qu’il a rĂ©cemment changĂ© de bureau. À noter, ce personnage permet l’introduction d’une touche d’humour dans la piĂšce, entre autres par le dĂ©tournement d’expressions communes. Au terme de sa quĂȘte, Simon rencontre Chamseddine, le chef de la rĂ©sistance du Sud. Tout comme pour Nazira ou Malak, ce personnage, bien que peu prĂ©sent physiquement », joue un rĂŽle clĂ© dans la piĂšce, puisque c’est lui qui rĂ©vĂšle Ă  Simon que son frĂšre perdu, Nihad Harmanni, est Ă©galement son pĂšre, Abou Tarek. Nihad Harmanni / Abou Tarek Le lecteur ou spectateur en vient donc Ă  concilier les deux hommes qui ne font qu’un. Nihad Harmanni, nommĂ© ainsi par ses parents adoptifs Roger et Souhayla Harmanni, devient tireur d’élite sous les ordres de Chamseddine. Il prend ensuite la route du Nord pour retrouver sa mĂšre, mais faute de succĂšs, est recrutĂ© par l’armĂ©e Ă©trangĂšre oĂč il devient un tireur d’élite cruel, qui prend en photo ses victimes et qui se fait des faux spectacles dans un pseudo-anglais. Quand il est promu au poste de chef de la prison, Nihad devient Abou Tarek. FascinĂ© par la femme qui chante, il se garde de la tuer et la viole Ă  rĂ©pĂ©tition. À son procĂšs, il Ă©voque le petit nez de clown, seule chose qui lui reste de sa mĂšre, et c’est ainsi que Nawal, suivant les procĂ©dures, apprend que son violeur est aussi le fils qu’elle a tant cherchĂ©, car elle avait laissĂ© Ă  ce dernier un petit nez de clown. Analyse dramaturgique Notre analyse portera sur les Ă©lĂ©ments dramaturgiques de la piĂšce qui appartiennent au courant de l’extrĂȘme contemporain. Nous sommes toutefois conscient qu’Incendies peut avoir des affinitĂ©s avec certains autres courants comme la postmodernitĂ© ou le théùtre d’Artaud. Nous avons ici fait le choix de nous concentrer sur son appartenance Ă  l’extrĂȘme contemporain. Pour ĂȘtre plus prĂ©cis, notre analyse s’articulera autour de quatre caractĂ©ristiques de l’extrĂȘme contemporain se retrouvant dans la piĂšce de Wajdi Mouawad le retour du rĂ©cit et du personnage, le refus de la catharsis, le rĂŽle central du traitement de la langue et l’éclatement du temps et de l’espace. Retour du rĂ©cit et du personnage Avec l’extrĂȘme contemporain, on assiste Ă  un retour du personnage et du rĂ©cit, lesquels avaient Ă©tĂ© dĂ©laissĂ©s au cours de la postmodernitĂ©. En ce qui concerne le personnage, cela signifie qu’il est de nouveau dotĂ© d’une Ă©paisseur psychologique. Ainsi, chaque personnage a sa personnalitĂ© propre; le personnage n’est plus interchangeable. Dans Incendies, on diffĂ©rencie effectivement les personnages les uns des autres. Mouawad va mĂȘme plus loin dans le dĂ©veloppement de ses personnages principaux, puisqu’il s’intĂ©resse Ă  la quĂȘte des origines de Jeanne et Simon et au parcours de vie de Nawal. Pour ce qui est du retour du rĂ©cit, on mentionnera simplement que la piĂšce rompt avec la postmodernitĂ© par le simple fait qu’elle raconte une histoire, ce qui la classe dans l’extrĂȘme contemporain. Ce qui caractĂ©rise normalement le rĂ©cit de l’extrĂȘme contemporain, c’est l’absence d’une fin bien dĂ©finie, l’histoire Ă©tant plutĂŽt laissĂ©e en suspens pour que le spectateur soit libre de formuler sa propre fin. Toutefois, Incendies s’éloigne de l’extrĂȘme contemporain en offrant une clĂŽture plutĂŽt conventionnelle, puisque la piĂšce s’achĂšve sur la fin du parcours initiatique des jumeaux et que ces derniers ont obtenu les rĂ©ponses Ă  leurs questions relativement Ă  leur origine. Refus de la catharsis Dans le théùtre de l’extrĂȘme contemporain, qui est pourtant parfois trĂšs violent, la catharsis n’opĂšre pas. C’est parce que la catharsis nĂ©cessite la reprĂ©sentation claire d’une figure du bien » et d’une figure du mal ». Dans le théùtre traditionnel, le spectateur peut facilement identifier le hĂ©ros du mĂ©chant, si bien qu’il peut aisĂ©ment reconnaĂźtre l’exemple Ă  ne pas suivre, ce qui est nĂ©cessaire pour que la catharsis fonctionne. Cependant, dans le théùtre de l’extrĂȘme contemporain, il est impossible de distinguer un hĂ©ros ou un mĂ©chant au sens habituel, car l’extrĂȘme contemporain porte l’idĂ©e que tout le monde est Ă  la fois bourreau et victime. Incendies illustre bien cette idĂ©e, puisqu’elle nous prĂ©sente plusieurs personnages apparemment rangĂ©s » dans le prĂ©sent, mais qui ont Ă©tĂ© coupables d’atrocitĂ©s par le passĂ©. On pensera notamment Ă  Fahim et Chamseddine. Quant Ă  Nihad/Abou Tarek, s’il est devenu cruel, on apprend toutefois que ce sont les circonstances de la vie qu’il a menĂ© aprĂšs que Nawal ait Ă©tĂ© forcĂ©e de l’abandonner qui l’ont rendu comme il est, si bien qu’on ne peut le voir simplement comme un vilain. D’autre part, l’idĂ©e que tout le monde est victime et bourreau est bien reprĂ©sentĂ©e dans la piĂšce par la formulation du cycle de la violence Ă  la scĂšne 17 p. 60-64, oĂč un mĂ©decin explique Ă  Nawal et Sawda que depuis des annĂ©es et des annĂ©es, un camp commet des atrocitĂ©s pour se venger des atrocitĂ©s commises par l’autre camp qui se vengeait lui-mĂȘme et ainsi de suite. Ici, ils sont donc tous bourreaux et victimes. Et c’est parce que tout le monde dans Incendies est bourreau et victime, que personne n’est bon » ou mauvais » au sens traditionnel du terme et que la catharsis n’opĂšre pas dans la piĂšce. RĂŽle central du traitement de la langue La langue du théùtre de l’extrĂȘme contemporain ne se veut pas rĂ©aliste, c’est-Ă -dire qu’elle ne cherche pas Ă  imiter la rĂ©alitĂ©. Il s’agit plutĂŽt d’une langue particuliĂšrement travaillĂ©e, qui est sculptĂ©e, poĂ©tique, théùtrale. Notamment, Incendies comporte plusieurs longues tirades et longs monologues tĂ©moignant de la primautĂ© du texte. Une autre caractĂ©ristique relativement au travail de la langue de l’extrĂȘme contemporain est l’emploi de tous les registres langagiers et de diffĂ©rentes langues. Dans la piĂšce, Mouawad Ă©crit tantĂŽt en français quĂ©bĂ©cois familier – qui inclut des insultes proprement quĂ©bĂ©coises – tantĂŽt dans un français standard soutenu. La scĂšne 2 p. 15-26 de la piĂšce met bien en Ă©vidence ce contraste, prĂ©sentant d’abord le testament de Nawal rĂ©digĂ© dans un parfait français, puis la tirade de Simon, qui parle dans un français quĂ©bĂ©cois populaire parsemĂ© de jurons. De mĂȘme, l’anglais et le français se cĂŽtoient dans le texte. L’exemple le plus marquant est la scĂšne 33 intitulĂ©e Les principes d’un franc-tireur » p. 115-116, oĂč Nihad/Abou Tarek imite un prĂ©sentateur amĂ©ricain dans un anglais approximatif contaminĂ© par le français. Toutefois, c’est gĂ©nĂ©ralement l’anglais qui vient contaminer le français, puisque le français quĂ©bĂ©cois, parlĂ© par les personnages de Jeanne et Simon, est naturellement Ă©maillĂ© d’anglicismes. Enfin, le travail de la langue se manifeste aussi dans Incendies d’une maniĂšre qui lui est propre Ă  travers le personnage d’Hermile Lebel, notamment par sa dĂ©formation des expressions courantes. DĂšs la premiĂšre page du texte, plutĂŽt que de dire la mer Ă  boire », il dit la mer Ă  voir » p. 13. Ainsi, Mouawad, grĂące Ă  ce personnage, peut non seulement jouer avec la langue Ă  loisir, mais peut Ă©galement insĂ©rer une touche d’humour dans un rĂ©cit autrement trĂšs grave. Éclatement de l’espace et du temps Incendies, dans la lignĂ©e de l’extrĂȘme contemporain, prĂ©sente un espace Ă©clatĂ©, c’est-Ă -dire que le lecteur/spectateur ne sait pas trĂšs bien oĂč se dĂ©roule l’action. Cet effet d’abstraction est notamment créé par une absence de nomination. Ainsi, jamais les pays ne sont nommĂ©s p. 151. Le Liban, par exemple, n’est jamais mentionnĂ© textuellement p. 153. On l’appelle plutĂŽt “le pays natal”, “le pays”, “le pays de votre mĂšre” », etc. De plus, la description du pays en elle-mĂȘme est trĂšs abstraite, puisqu’on situe les lieux en fonction des points cardinaux. Par exemple, NabatiyĂ© est simplement un village sur la route allant vers le Sud. Il faut noter que l’abstraction est maintenue mĂȘme si l’auteur Ă©voque quelques noms de lieux rĂ©els comme NabatiyĂ© et Kfar Matra, car il le fait en sachant qu’il Ă©crit pour un public quĂ©bĂ©cois n’ayant aucune connaissance de la gĂ©ographie libanaise p. 153-154. Il s’agit donc plus de clins d’Ɠil que d’autre chose. Enfin, on remarquera qu’aucune appartenance nationale ou religieuse n’est nommĂ©e directement dans le texte. On se contente de les dĂ©signer de maniĂšre gĂ©nĂ©rique par les rĂ©fugiĂ©s », les miliciens », la rĂ©sistance de la rĂ©gion de Sud » et l’ArmĂ©e du Sud » p. 154, ce qui contribue Ă  l’abstraction gĂ©nĂ©rale. L’espace n’est pas la seule chose qui soit Ă©clatĂ©e dans Incendies, le temps l’est aussi. D’abord, le temps est Ă©clatĂ© dans le sens qu’il ne s’écoule pas de façon linĂ©aire. Ainsi, on ignore sur combien de temps s’échelonne l’histoire et on ne sait pas combien de temps s’écoule entre les diffĂ©rentes scĂšnes. De mĂȘme, il faut mentionner que la chronologie globale de l’histoire ne correspond pas Ă  celle de la guerre du Liban p. 155. De plus, Mouawad brouille encore un peu plus les repĂšres temporels en Ă©vitant de fournir des dates prĂ©cises p. 156. Le temps de la piĂšce est donc un temps dilatĂ©, Ă  la signification symbolique p. 157, tel qu’illustrĂ© par des repĂšres temporels abstraits comme Nous sommes au dĂ©but de la guerre de cent ans » p. 76. Enfin, Mouawad achĂšve d’éclater le temps en entremĂȘlant les Ă©poques, alternant le rĂ©cit de Nawal au passĂ© et le rĂ©cit des jumeaux au prĂ©sent. Allant encore plus loin, il fait parfois se rencontrer les deux Ă©poques dans une mĂȘme scĂšne. Par exemple, dans la scĂšne 14 FrĂšre et sƓur » p. 53-57, non seulement on alterne entre Nawal/Sawda et Jeanne/Simon, mais Nawal et Sawda croisent Jeanne sur scĂšne. Jugement gĂ©nĂ©ral Selon nous, Incendies est l’une des meilleures piĂšces d’extrĂȘme contemporain des derniĂšres annĂ©es, car Wadji Mouawad parvient Ă  tirer le maximum des procĂ©dĂ©s propres Ă  l’extrĂȘme contemporain, notamment en ce qui concerne l’éclatement de l’espace et du temps et le travail de la langue. Ainsi, le dramaturge mĂ©lange habilement passĂ© et prĂ©sent, toujours de maniĂšre Ă  apporter une plus grande profondeur symbolique, sans que les transitions soient abruptes. Quant Ă  la langue, non seulement Mouawad offre un texte bien rythmĂ© et trĂšs poĂ©tique, mais il exploite aussi pleinement le potentiel que lui offre un milieu comme le QuĂ©bec, une province bilingue qui parle un français fortement influencĂ© par l’anglais. Mouawad n’hĂ©site donc pas Ă  utiliser tout le matĂ©riel langagier Ă  sa disposition pour rendre son texte efficace, combinant français standard, français quĂ©bĂ©cois, anglais, langue populaire et langue soutenue selon l’agencement le plus harmonieux. Se procurer Incendies [1] Françoise Coissard, Wajdi Mouawad Incendies, Paris, HonorĂ© Campion, collection Entre les lignes littĂ©ratures Sud », 2014, p. 7. DĂ©sormais, les rĂ©fĂ©rences Ă  ce texte seront indiquĂ©es entre parenthĂšses Ă  la suite des citations, avec la mention Coissard ». [2] AllocinĂ©, Incendies », page consultĂ©e le 12 septembre 2018. [3] Wajdi Mouawad, Incendies – Le sang des promesses 2, MontrĂ©al, LemĂ©ac/Actes Sud, coll. Babel », 2011, p. 136. DĂ©sormais, les rĂ©fĂ©rences Ă  ce texte seront indiquĂ©es entre parenthĂšses avec le numĂ©ro de page pertinent. PmXd.
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